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L'abbé de Saint-Gervais, croyant l'air de l'Angleterre nuisible à sa santé, résolut de passer sur le continent. L'abbé Baston l'y suivit, et ils s'embarquèrent à Douvres vers le mois d'octobre 1793, pour les Pays-Bas. Ils prirent terre à Ostende, traversèrent les Pays-Bas, et s'arrêtèrent à Hers, petit village peu éloigné de Maestricht. Ils y restèrent jusqu'au mois de juillet 1794, époque à laquelle l'approche des armées françaises les força de fuir. Ils allèrent d'abord à Mosck, à l'extrémité de la Gueldre prussienne, passèrent à Nimègue, à Arnheim, à Doesbourg, et entrèrent en Westphalie, reculant toujours devant les troupes républicaines; enfin ils s'arrêtèrent à Coesfeld où ils passèrent le temps de leur exil. Cette ville étoit de l'évêché de Munster, une des parties de l'Allemagne où les prêtres et les émigrés éprouvèrent plus d'égards et de bienveillance.

C'est pendant son séjour à Coesfeld que M. Baston rédigea ses Mémoires particuliers que l'on conserve dans sa famille, et qui forment quatre volumes in-4o; ces Mémoires ont beaucoup servi à la rédaction de la Notice biographique imprimée à Rouen, laquelle nous a été fort utile à nousmême. L'abbé Baston employa sa retraite à préparer quelques autres ouvrages dont nous parlerons plus bas. Il ne laissa pas, malgré l'éloignement, de prendre part aux affaires du diocèse de Rouen, et il entretint une correspondance aussi suivie que les circonstances le permettoient. Le cardinal de La Rochefoucauld, qui résidoit à Munster, à peu de distance de Coesfeld, lui avoit donné tous ses pouvoirs, et le nomma, le 28 mai 1799, à la prébende de Nécy, dans le chapitre, vacante par la mort du titulaire; faveur que les circonstances rendirent inutile, les biens du clergé étant déjà vendus depuis quelques années. Le cardinal mourut le 23 septembre de l'année suivante. La Notice de Rouen ne dit point quelle part eut l'abbé Baston dans l'administration pendant la vacance du siège, mais il est impossible qu'il n'y ait pas été pour quelque chose. Les démêlés qui s'élevèrent alors sur l'exercice de la juridiction nécessitérent l'intervention de l'autorité pontificale. M. d'Argentré, évêque de Seez, obtint un bref du 1er juin 1801, qui le déclara administrateur du diocèse de Rouen; ce prélat, qui résidoit à Munster, fit paroître un Mandement du 15 juillet pour notifier ses pouvoirs; mais les vicaires capitulaires

nommés par une fraction du chapitre ne reconnurent pas son autorité, et continuèrent à exercer la juridiction. M. l'abbé de Salamon, aujourd'hui évêque de Saint-Flour, prit aussi le titre d'administrateur apostolique des diocèses vacans de Normandie. Le concordat publié en 1802 fit cesser ces contestations.

Des temps plus favorables ayant paru luire sur la France, l'abbé Baston rentra dans sa patrie, et arriva à Rouen le 26 mai 1802. Il s'étoit fait précéder d'un écrit sous ce titre : la Branche d'olivier présentée aux ecclésiastiques du diocèse de Rouen, in-8°, et peu après il donna encore les Docteurs romains ou Entretiens sur la démission des évêques, recueillis par le citoyen Fridemmanns ; à ***, 1802, in-8°. Dès son arrivée, l'abbé Baston s'étoit hâté d'aller visiter une de ses sœurs qui habitoit à St-Laurent, près Pontaudemer; mais M. Cambacérès, archevêque de. Rouen, le tira de sa retraite. Le prélat le nomma d'abord à une cure importante que M. Baston refusa pour raison de santé; ensuite il le fit chanoine, et l'abbé Baston devint successivement grandvicaire, official, théologal, et enfin doyen du chapitre. Il jouissoit de toute la confiance de l'archevêque, déclaré cardinal en 1803, et il l'accompagna à Paris lors de la cérémonie du sacre en 1804. Il passa assez long-temps dans la capitale, et renoua ses liaisons avec ses anciens amis, notamment avec M. Duvoisin, évêque dé Nantes (1). A son retour à Rouen, il obtint du cardinal d'aller revoir ses amis de Westphalie, et passa avec eux quelques semaines, dans les douceurs d'un commerce qui n'étoit plus troublé, comme pendant son exil, par les désastres de sa patrie.

A Rouen, le temps de l'abbé Baston se partageoit entre l'exercice du ministère et l'administration du diocèse. Actif, laborieux, il prêchoit, dirigeoit les consciences, et donnoit ses soins à différentes communautés. On a trouvé parmi ses manuscrits des sermons, panégyriques et conférences, dont le recueil pourroit former 2 volumes in-8°. L'Académie de Rouen l'admit dans son sein, et depuis 1804 jusqu'en 1811 y lut douze mémoires, dissertations ou opuscules sur des

il

(1) La Notice de Rouen dit qu'il revit alors M. de La Luzerne, ancien évêque de Langres. C'est une erreur : cè prélat ne rentra en France qu'en 18r4.

sujets de littérature, d'histoire ou de critique (1). Les talens de l'abbé Baston, son savoir, son aptitude aux affaires, son expérience, tout contribuoit à le faire regarder comme un des hommes les plus distingués dans le clergé du deuxième ordre. Le cardinal Cambacérès voulut encore l'avoir auprès de lui, lorsqu'il vint à Paris en 1811 pour assister au concile. L'abbé Baston, dit la Notice biographique de Rouen, rédigea pour le cardinal une déclaration lue par celui-ci au concile, et qui fut approuvée de la plupart des évêques, et devint la base des articles arrêtés le 5 août; ainsi s'exprime la Notice, mais nous devons dire qu'ayant fait quelques recherches sur les opérations du concile, nous n'avions encore rien appris de la déclaration du cardinal Cambacérès. Du reste, nous avons quelques raisons de croire que l'abbé Baston approuva en effet le décret du 5 août, et il est assez probable qu'il porta le cardinal à voter dans ce sens. Mais ce décret ne fut point un service rendu à l'église gallicane, et la forme seule dans laquelle il étoit conçu indiquoit qu'on s'y étoit surtout proposé de plaire à l'empereur; aussi celuici fut content, dit toujours la Notice, du zèle de l'abbé Baston dans cette affaire, et lui fit offrir l'évêché de Seez. L'évêque de cette ville, M. Hilarion-François Chevigné de Boischollet avoit encouru la disgrâce de Buonaparte, qui l'avoit exilé à Nantes, et l'avoit forcé de donner sa démission. On assure que M. Baston refusa, ne voulant point accepter un siège sans savoir si la démission du titulaire avoit été acceptée par le saint Siège. Il ajouta qu'il désiroit par-dessus tout rester comme il étoit; tel est le récit des amis de Baston.

(1) Ces opuscules sont, suivant la Notice de Rouen, Apisticus ou le Favori, conte moral; Examen des réflexions du_lord_Bolingbrocke sur l'exil; Réclamation relative aux Voyages de Paul Lucas; Dissertation sur un fragment de tablettes enduites de cire dans le genre des Romains; Mémoire sur la couleur noire; Remarques historiques et critiques sur l'église de Westminster; Observations sur la prononciation du mot français qui signifie prendre ou donner de l'orgueil; Dissertation sur des antiquités découvertes dans la plaine de Saint-Andrésur-Cailly; Examen du sentiment de Tatien, d'Arnobe, de saint Justin et de saint Irénée sur l'immortalité de l'ame, contre l'auteur de la Philosophie de la nature; Remarques sur le mot considération; Notice sur les serfs et la servitude dans la principauté de Munster, en Westphalie; Remarques sur la valeur et l'usage du mot davantage.

Il retourna donc à Rouen vaquer à l'administration du diocèse. Cependant les affaires de l'Eglise étoient toujours dans un état déplorable. En 1812, le Pape fut amené à Fontainebleau, et, au mois de janvier suivant, Buonaparte lui arracha quelques concessions que l'auguste captif révoqua bientôt. Ce fut dans ces circonstances que Buonaparte s'avisa de nommer à plusieurs sièges épiscopaux, entr'autres à Seez. Le décret de nomination de l'abbé Baston à ce siège étoit du 14 avril 1813; on dit, dans la Notice imprimée, qu'il hésita quelque temps à accepter. M. de Boischollet, évêque de Seez, étoit mort à Nantes le 23 février 1812; mais les circonstances n'en étoient pour cela guère plus favorables. Le Pape refusoit des bulles aux évêques nommés par son persécuteur; on essayoit d'y suppléer, en faisant donner par les chapitres des pouvoirs d'administrateurs capitulaires à ces évêques nommés. Le ministre des cultes écrivit donc au chapitre de Seez, comme à ceux de Troyes, de Gand et de Tournay. Le 30 avril, le chapitre de Seez s'assembla extraordinairement, et associa l'abbé Baston aux deux vicaires-géné raux déjà nommés pendant la vacance du siège, MM. Le Clerc et Le Vavasseur. Toutefois la Notice prétend que l'abbé Baston ne consentit qu'avec répugnance, et par déférence pour les conseils de quelques amis, à se charger du fardeau de l'épiscopat. Ce fut, dit-elle, avec la résignation d'un martyr plutôt qu'avec l'ardeur d'un apôtre qu'il alla, le 30 mai prêter le serment d'usage entre les mains de l'impératrice-régente; car l'empereur étoit alors en Allemagne. Loin de nous l'idée de vouloir plaisanter sur un tel sujet; mais la résignation de ce martyr ne dut pas être d'un grand effort, et la maladie qui s'en suivit, d'après la Notice, ne dut être ni grave, ni longue, puisque nous voyons, au mois de juin, M. Baston à Seez. Il nous reste à raconter ce qu'il y fit. Ici, nous sommes obligé de nous écarter entièrement de la Notice, qui, pour louer l'abbé Baston, semble inculper à la fois le Pape et tout le clergé d'un diocèse : nous tâcherons d'être plus juste, et nous rapporterons les faits avec impartialité. Peut-être notre récit aura-t-il d'autant plus d'intérêt, que rien jusqu'ici n'a été publié sur les affaires de Seez et sur l'administration de M. Baston.

(La fin à un numéro prochain.)

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. Le Moniteur contient dans sa partie officielle la note suivante: « M. Panckoucke ayant sollicité auprès du conseil royal de l'instruction publique l'avantage de voir sa Traduction de la Germanie, de Tacite, faire partie des bibliothèques des collèges, son travail a été, suivant l'usage, soumis à un examen; d'après un rapport favorable, la demande de l'auteur a été accueillie. Malheureusement parmi les nombreuses notes dont le texte est accompagné, il en est une qui se trouve souillée d'une impiété grossière, et qui à échappé à l'attention de l'examinateur (note 5, chap. 8). En conséquence, le conseil royal se fait un devoir de déclarer que sa religion a été surprise, et qu'il a révoqué sa décision.» M. Panckoucke a fait insérer dans quelques journaux une lettre où il se plaint de l'extrême sévérité du conseil de l'Université. Il assure que la note qui a provoqué la décision du conseil n'est point son opinion particulière, que cette note, ainsi que les autres, sont extraites de divers auteurs ce qui forme une excuse assez singulière; car en est-on moins répréhensible parce qu'on rapporte des impiétés déjà proférées par d'autres? Il paroît que M. Panckoucke, qui, ainsi que son père, a imprimé beaucoup de livres dont la religion auroit à se plaindre, n'est pas fort sévère en fait d'orthodoxie. La note blâmée est de la nature la plus injurieuse pour le culte de la sainte Vierge. Ce culte, quoi qu'on en dise, n'est point une institution récente, ni une dévotion accréditée dans les derniers temps: nous voyons, par l'histoire de l'Eglise, que, dès les premiers siècles, des églises furent consacrées sous le nom de Marie, et le concile général d'Ephèse, en 431, proclama, contre Nestorius, que la sainte Vierge étoit réellement mère de Dieu.

Les trois prélats nouvellement institués ont eu, jeudi, une audience particulière du Roi, et se proposent de partir la semaine prochaine.

- Dimanche dernier, un juif âgé de vingt ans, et qui avoit déjà commencé des études pour devenir rabbin, a reçu le baptême dans la chapelle des Dames de la Visitation, rus

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