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Assemblée de charité,

Malgré les troubles de la révolution, la charité avoit rétabli, daas Paris même, l'ancienne société spécialement chargée de porter aux prisonniers, les secours et les consolations que la piété doit au malheur, et qui, dans ces derniers temps, étoient si souvent devenus nécessaires à la vertu persécutée.

Tolérée par le gouvernement, la société paroissoit presqu'unique. ment occupée des détenus pour dettes et de leurs familles. A peine osoit-elle avouer que souvent elle allégeât les souffrances de ces prisonniers, qui n'eurent d'autre crime que trop d'attachement à leurs devoirs. Des François, fidèles à leur Roi; de saints prêtres qui refusérent de trahir leur conscience; des Espagnols, qualifiés de rebelles, par cela seul qu'ils résistoient à l'usurpation; des prisonniers de guerre lui furent redevables de l'allégement de leurs maux.

Long-temps cette association, à la tête de laquelle on aime à retrouver l'instituteur d'un Roi captif (1), dut s'imposer la réserve la plus grande; mais aujourd'hui il lui est permis de remplir un devoir dont elle avoit toujours été privée.

Dans cette vue, lundi prochain, 23 mai, elle fera célébrer, à midi et demi précis, dans l'église de Saint-Thomas-d'Aquin, un service solennel pour toutes les victimes de la révolution, et notamment pour les prisonniers morts pendant nos longs malheurs.

Au milieu de la messe, une exhortation analogue à la circonstance sera faite par M. l'abbé Duval.

La cérémonie sera terminée par une quête pour les pauvres pri sonniers.

Les détenus pour opinions politiques ont recouvré leur liberté ; mais un grand nombre n'ont pu encore se procurer aucune res source et les prisonniers pour dettes ne sont pas rendus à leurs

enfans.

ne

Les personnes qui, désirant concourir à cette bonne œuvre, pourroient pas, le jour de la quête, apporter leur aumône, sont priées de la déposer chez Mme. la comtesse de Gibon, trésorière de la société, rue Neuve-Notre-Dame-des-Chanips, no. 24; ou chez MM. les notaires dont les noms suivent :

MM. Duchesne, rue Saint-Antoine, no. 200; Robin, rue des Filles-Saint-Thomas, no. 19; Louveau, rue Saint-Martin, no. 119; Rendu, rue Saint-Honoré, no. 317; Boulard, rue des Petits-Augustins, no. 21; Denis, rue de Grenelle-Saint-Germain, no. 3.

(1) M. l'abbé d'Avaux, instituteur de Louis XVII.

T

Sur l'esprit public, les opinions, les alarmes et les critiques.

Au milieu de la révolution mémorable qui vient de nous sauver et qui occupe avec raison tous les esprits, il en est qui conservent je ne sais quelle inquiétude et quelle défiance assez peu raisonnables et assez peu fondées. On entend des gens peureux se plaindre tout bas. L'un trouve qu'on se presse trop, l'autre qu'on ne se presse pas assez. Celui-ci est fâché qu'il n'y ait pas encore de constitution, celui-là trouve mauvais qu'on s'occupe d'en rédiger une. Il y en a qui voudroient proscrire impitoyablement tout ce qui tient au nouveau régime, et il y en a au contraire qui redoutent tout ce qui est du régime ancien. Cette mesure est intempestive, vous dit-on, cette loi est prématurée, cette démarche est imprudente. Enfin au milieu du concert des acclamations, quelques voix discordantes sèment l'aIarme, propagent la défiance, font courir des bruits facheux. Il regne parmi certaines gens une manic frondeuse dont je crois reconnoître le principe. Comme nous avons vécu long-temps sous des gouvernemens que nous détestions, nous nous sommes accoutumés à en blâmer toutes les opérations. Cette censure étoit, la plupart du temps, fort légitime; mais elle est devenue aussi une affaire de mode, et j'ai peur qu'elle ne survive aux circonstances qui l'ont fait naître, et qui l'excusent. Cette habitude de contrôler régnoit dans toutes les classes, parce que toutes les classes souffroient. Chacun vouloit raisonner sur le passé, sur le présent, sur l'avenir, parce qu'en effet sur tous ces points il y avoit de quoi exciter le mécontentement et Tome Ier, L'Ami de la R. et du R. No. X.

l'inquiétude. Cette disposition, je le répète, étoit fondée sous un gouvernement justement haï, mais elle doit cesser sous une administration bienfaisante et paternelle. La frayeur de l'esclave doit faire place à la confiance filiale. Pourquoi donc voit-on encore des esprits soupçonneux semer des plaintes vagues, et affecter des craintes ridicules? Pourquoi continuent-ils à blâmer et à critiquer, tandis que tous devroient se réunir pour approuver et applaudir? Nous ne vivons plus sous un étranger ambitieux dont on pouvoit tout redouter. Nous avons retrouvé un Roi, né parmi nous, issu d'une famille liée depuis long-temps avec nous par des nœuds étroits, un Prince sage, mûri à l'école de l'adversité, et que le temps, ses réflexions, ses malheurs et de grandes leçons, ont instruit et préparé de longue main pour les importantes fonctions qu'il a à remplir. Quel meilleur garant pouvons-nous avoir de sa sagesse, que les méditations et les études auxquelles il s'est livré dans sa retraite, et les premières démarches par lesquelles il a signalé le commencement de son règne? Reposons-nous donc sur lui du soin de sortir des circonstances difficiles où nous nous trouvons., Faisons taire nos habitudes inquiètes, nos craintes pusillanimes, notre manie de censures et de blâme. Ayons une juste confiance en un Prince qui vent le bien. Secondons-le de tout notre pouvoir, en inspirant aux autres cette confiance, en n'ayant pas l'air de douter du succès. C'est servir la cause du tyran qui n'est plus que de semer des alarmes sur l'avenir et de grossir le mal. Il a des émissaires secrets qui se plaisent à tout envenimer, à tout contrôler, qui ne parlent que d'embarras, de contradictions, d'oppositions, qui jugent tout impossible. Nous sommes, sans nous en douter, les échos de ces gens-là quand nous critiquons aussi ce

qui se fait, ou que nous manifestons des craintes sur ce qui se fera. Ne cédons point à ces impulsions étrangères. Défions-nous de cet esprit frondeur, fruit de la révolution, et qui doit finir quand elle est terminée. Ballotés par l'orage, n'ayons plus la prétention d'être les pilotes, et abandonnons le gouvernail à des mains plus habiles et plus sûres. Il est temps que chacun ne se mêle que de ce qui le regarde, et se défasse de cette prétention de juger tout. Il est temps d'abandonner les hautes discussions de la politique, et le soin des affaires de l'Etat à ceux que leur rang et leurs études appellent à endécider. Rentrons chacun dans les bornes de nos attributions respectives. Attendons tranquillement que des têtes plus mûres soudent nos plaies, et en trouvent le remède. Modérons cette vivacité nationale, cette ardeur qui empiète sur l'avenir, et qui s'inquiète de tout. La sagesse consiste à être calme dans sa prévoyance, à ne vouloir pas jouir trop tôt, et à ne pas troubler, par une agitation intempestive, les les premiers momens d'une paix, qui a besoin du temps pour faire sentir partout son influence.

Des gens timides ou soupçonneux, craignent, disent-ils, d'être gouvernés par des prêtres. Comment l'entendent-ils? Croient-ils que ce seroit un si grand malheur que les ministres de la religion eussent qu que influence? Sans doute je ne souhaite point au clergé de devenir puissant. Je ne souhaite point à ses membres des fonctions éclatantes qui les éloigneroient de celles de leur état. Je crois qu'il est utile en général que les ecclésiastiques s'occupent de leur ministère, sans prétendre pourtant priver l'Etat des talens et des services de ceux qui, comme Suger, d'Amboise ou Richelieu, sauroient s'illustrer par de grandes vues politiques et par les soins de l'administration. Mais en même temps

que je désire que les prêtres soient restreints à leurs

fonctions naturelles, je souhaite qu'on les environne aux yeux des peuples d'une considération qui tournera moins encore à leur avantage qu'à celui de la société. Le gouvernement qui vient de tomber les tenoit dans l'oppression. Il avoit toujours l'air de les craindre. H les traitoit avec défiance, il les punissoit avec sévérité. Comme il n'étoit pas religieux, il redoutoit tout ce qui tenoit à la religion. Comme il savoit que le clergé blâmoit sa conduite envers le chef de l'Eglise, il étoit toujours prêt à sévir contre le clergé, et la conscience de ses torts lui en faisoit commettre de nouveaux. Cet état de choses va cesser. La religion sera honorée. On ne la traitera plus comme un objet de politique. Nos Princes la chérissent par sentiment, la pratiquent par conviction, la font respecter par devoir. Ils sentent que nos maux viennent de l'avoir méconnue, et qu'il est de leur intérêt de la protéger franchement. Ils pro pageront, ils affermiront son empire, ils chercheront à augmenter son influence, à la rendre vénérable aux yeux des peuples, à la rappeler dans les esprits qui l'ont oubliée. Les méchans avoient eu leurs raisons pour la décrier. Ils vouloient faire la révolution, et pour y réussir, il falloit ôter au peuple sa morale et les principes de religion qui en sont la base. De là tant de livres et de pamphlets contre les prêtres. De là ce soin de les rendre odieux ou ridicules, et ces diatribes semées contr'eux jusque dans les campagnes où on redoutoit leur influence. Il est juste et politique de les relever de cet état d'abaissement et d'humiliation. Sans être trop ambitieux, ils peuvent prétendre à jouir du repos et de l'estime qui leur est due. Leurs ennemis leur envieroient-ils cette consolation? Il est temps d'ab

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