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de la débauche font des progrès effrayans, et si dans les campagnes le feu sacré de la religion s'éteint, quel moyen reste-t-il de contenir des hommes livrés à des penchans aveugles et à toute la fougue des passions, sans que rien les arrête?

Malheureusement le mal commence à être extrême, et les vides, qui se multiplient, deviennent tous les jours plus difficiles à remplir. L'auteur croit que ce n'est que dans ces mêmes campagnes que l'Eglise peut réparer ses pertes: «que chaque curé, selon ses moyens, dit-il, s'occupe de l'instruction de quelques élèves.... lorsqu'on se sera assuré de leurs dispositions et de leur caractère, ils passeront, déjà instruits des élémens de la langue latine, dans de petits séminaires ». Il est certain qu'autrefois ces moyens ont procuré à l'Eglise beaucoup de sujets, et même aux universités des sujets distingués (1). Un curé, un religieux trouvoit sous sa main un enfant pauvre qui annonçoit du talent. Il l'attiroit, il se faisoit un plaisir de donner les premiers développemens. Il savoit ensuite pousser et produire son jeune élève à ses dispositions. Mais les curés de campagne d'alors et les religieux pouvoient et trouvoient ce qu'on ne peut et ce qu'on ne trouve plus aujourd'hui, Dirai-je que loin d'éprouver de l'encoura→ gement, ce genre de services a été repoussé? On pourroit citer des curés qui se vouoient à ces soins utiles, et qui ont été obligés d'y renoncer, parce qu'un réglement les assujettit à un paiement de droits, qué ne leur permettoient pas leurs foibles facultés.

(1) On sait que c'est à un Bénédictin des Blancs-Manteaux, que l'Université et les lettres doivent le célèbre Rollin, qui, dans son enfance, alloit lui servir la messe.

Les maux sur lesquels l'auteur appelle l'attention de tous les amis du bien et de la religion ne sont que trop réels. Ils augmentent tous les jours par la diminution des ouvriers évangéliques, et il devient trèspressant d'y remédier. Espérons que le gouvernement sage, religieux et paternel que nous venons de recouvrer, s'empressera de s'en occuper, et que nous reverrons bientôt cette église de France, autrefois si brillante de vertus et de savoir, sinon florissante de tout son ancien lustre, au moins sortie de l'abaissement où on l'a réduite, consolée des amertumes qu'elle a eues à éprouver, édifiante, charitable, instruite, et terrible encore, comme cette armée rangée en bataille (1), dont parlent les livres saints, pour en im poser à l'impiété et à l'erreur.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

L.

PARIS. M. de Boulogne, évêque de Troyes, vient de partir pour son diocèse, où il est appelé par les besoins d'un troupeau privé depuis long-temps de pasteur. I n'y a point eu, depuis deux ans, d'ordination à Troyes, et M. l'évêque a obtenu les dispenses pour faire une ordination extra tempora. Il paroît qu'elle sera fort nombreuse. C'est un secours qui viendra bien à propos, après les désastres d'une épidémie qui a enlevé beaucoup de curés. Le diocèse de Troyes a souffert plus qu'aucun autre dans la dernière campagne. Traversé en tout sens par les diverses armées, il a éprouvé tous

(1) Terribilis ut castrorum acies pardinata; mots que les saintes Ecritures appliquent à l'épouse des Cantiques, regardée par les Pères comme la figure de l'Eglise.

les fléaux à la fois. La fièvre dite d'hôpital y a fait de grands ravages, particulièrement dans le clergé. Beaucoup de paroisses sont vacantes; beaucoup de prêtres sont âgés. Les derniers troubles ont arrêté des vocations naissantes, et détruit des établissemens utiles. On attend l'arrivée de M. l'évêque, et l'on espère que sa présence, son zèle et ses soins contribueront à améliorer la situation d'un diocèse si cruellement tourmenté sous le rapport religieux et sous le rapport politique. Il vient d'adresser au clergé et aux fidèles de son diocèse, un Mandement pour ordonner des prières en actions de grâces pour la paix. On y trouve un tableau énergique et fidèle des avantages de cette paix, et des horreurs de l'état qui l'a précédée (1).

« Chefs de famille, c'est à vous surtout qu'il appartient de célébrer la paix dont nous allons jouir. Vous ne la verrez donc plus cette fatale conscription, la plus grande calamité qui pût tomber sur un Empire, désespoir éternel de la tendresse maternelle; cette mort de tous les talens comme de toutes les vertus, qui, engloutissant les générations naissantes, dévoroit à la fois, et les ressources du présent et les espérances de l'avenir. Vous ne la verrez plus, cette éducation militaire qui marchoit en sens contraire de toute civilisation; qui exaltoit les têtes dans un âge où il faut les calmer, qui avoient transformé nos paisibles écoles en camps tumultueux, et en arênes de gladiateurs; avec laquelle on apprenoit à ne connoître d'autre droit que la force, d'autre vertu que la valeur, d'autre honneur que celui des armes; qui tournoit tous les sentimens vers l'amour de l'indépendance, vers l'irrévérence envers Dieu, envers les parens et envers les vieillards; et qui, par une réciprocité horriblement combinée, corrompoit les enfans pour en faire des soldats, et ensuite en faisoit des soldats pour les corrompre......

>> Désabusons-nous donc pour toujours, Nos très-chers Frères, de cette gloire mensongère qui nous a coûté tant de larmes, et de cette fureur des conquêtes qui est le fléau des

- (1) Se trouve au bureau du Journal.

nations. Rappelons-nous sans cesse que la véritable grandeur ne consiste pas à étendre sans fin sa force et son pouvoir, mais à les contenir et à en connoître les bornes; que la sagesse qui conserve et qui laisse tout à sa place, est mille fois plus digne de louanges que la valeur qui prend des villes; ainsi qu'un fleuve qui fertilise tranquillement ses bords, est préférable à ces torrens impétueux qui les franchissent pour inonder les villes et les campagnes. Convainquons-nous, de plus en plus, que le premier besoin des peuples, c'est la paix, que le seul et unique bonheur qui convienne à notre condition mortelle, c'est la paix; que la Providence n'a réuni les hommes en société et ne leur a donné un gouvernement, que pour la paix; que tout cet esprit qui sort de ces principes éternels est un génie malfaisant, ennemi de la nature humaine; et qu'enfin, un seul jour de paix et de vertu, vaut mieux que mille années de bruit, de triomphes et de gloire ».

-Nous avons reçu aussi plusieurs autres Mandemens pour le même objet. Celui de M. l'évêque de Nancy est plein de réflexions fort justes sur les bienfaits dont nous sommes redevables à la Providence dans ces circonstances mémorables. Celui de M. l'évêque de Baïeux est court, le prélat ayant déjà eu occasion de traiter ce sujet ailleurs.

-Aux évêques récemment arrivés d'Angleterre, il faut joindre M. de Bovet, évêque de Sistéron, un des derniers évêques nommés par le Roi. Il fut sacré au mois de septembre 1789. Son diocèse jouit par conséquent bien peu de ses lumières et de son zèle. Ce prélat est connu par un ouvrage de piété, intitulé: Motifs de consolation dans des temps de troubles.

Des lettres de Rome, du 22 juin, annoncent que M. le cardinal Maury y étoit arrivé, et qu'il avoit reçu défense de se présenter au palais du Pape. On ignoroit encore ce qui seroit statué à son égard. Mer, Sala, qu'on a vu long-temps à Paris, où il étoit attaché à la légation, qui s'y est fait estimer par ses qualités et par son zèle, et qui n'avoit quitté ce poste que pour ne pas con

niver à la foiblesse et aux complaisances d'un homme fort connu, a été nommé secrétaire d'une congrégation de cardinaux, chargée de prendre connoissance des changemens opérés à Rome et dans les Etats du Pape pendant les derniers troubles, et d'y appliquer le remède. Mr. Sala avoit été fait précédemment à Césène, protonotaire apostolique. M. Caprano, professeur d'histoire ecclésiastique au collége romain, qui avoit été déporté, a été fait canoniste de la pénitencerie.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Le 12 juillet, M. l'abbé de Montesquiou, M. Ferrand et le général Dessoles, ministres d'Etat, se sont rendus à la chambre des Députés. M. le ministre de l'intérieur a fait un rapport sur la situation du royaume. Il n'a point dissimulé les difficultés de notre position. Il résulte des calculs qu'il a présentés, que les dettes de l'Etat, pendant le cours des treize dernières années, se sont accrues jusqu'à la somme d'un milliard, six cent quarante-cinq millions, quatre cent soixanteneuf mille francs. Il ne peut entrer dans notre plan d'insérer en entier ce rapport, quel qu'en soit l'intérêt. Nous nous contenterons d'en citer ce qui nous a paru fait particulièrement pour être mis sous les yeux de nos lecteurs. Le ministre a commencé ainsi :

« Messieurs, S. M. en prenant les rênes du gouvernement, a désiré faire connoître à ses peuples l'état où elle trouvoit la France: la cause des maux qui accabloient notre patrie a disparu; mais ses effets subsistent encore long-temps encore, sous un gouvernement qui ne s'occupera qu'à réparer, la France souffrira des coups que lui a portés un gouvernement qui ne travailloit qu'à détruire. Il faut donc que la nation soit instruite et de l'étendue et de la cause de ses souffrances, pour pouvoir apprécier et seconder les soins qui doivent les adoucir: éclairée ainsi sur la grandeur et la nature du mal, elle n'aura plus qu'à partager les travaux et les efforts de son Roi pour rétablir ce qu'il n'a point détruit, pour guérir des plaies qu'il n'a point faites, et réparer des torts qui lui sont étrangers.

La guerre a été sans contredit la principale cause des maux de la France; l'histoire n'offroit encore aucun exemple d'une grande nation sans cessé précipitée, contre son gré, dans des entreprises de plus en

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