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plus hasardeuses et funestes; on a vu avec un étonnement mêlé de iero reur, un peuple civilisé, condamné à échanger son bonheur et son repos, contre la vie errante des peuples barbares; les liens des familles ont été rompus; les pères ont vieilli loin de leurs enfans, et les enfans sont allés mourir à 400 lieues de leurs pères: aucun espoir de retour n'adoucissoit cette affreuse séparation; on s'étoit accoutunté à la regarder comme inévitable, comme éternelle, et on a vu des paysans bretons, après avoir conduit leurs enfans jusqu'au lieu du départ, revenir dans l'église de leur paroisse dire d'avance les prières des

morts.

Il est impossible d'évaluer l'effroyable consommation d'hommes qu'a faite le dernier gouvernement; les fatigues et les maladies en ont enlevé autant que la guerre : les entreprises étoient si vastes et si rapides que tout étoit sacrifié au désir d'en assurer le succès; nulle régularité dans le service des hôpitaux, dans l'approvisionnement des ambulances : ces braves soldats, dont la valeur faisoit la gloire de la France, qui donnoient sans cesse de nouvelles preuves de leur énergie et de leur patience, qui soutenoient avec tant d'éclat l'honneur national, se voyoient délaissés dans leurs souffrances, et livrés sans secours à des maux qu'ils ne pouvoient plus supporter. La bonté françoise étoit insuffisante pour suppléer à cette négligence cruelle, et des levées d'hommes, qui autrefois auroient formé de grandes armées, disparoissoient ainsi sans prendre part aux combats. De là, la nécessité de multiplier le nombre de ces levées, de remplacer sans cesse par des armées nouvelles des armées presque anéanties; l'état des appels ordonnés depuis la fin de la campagne de Russie est effrayant; il se monte à treize cent mille hommes >>......

L'administration des hospices est dans une situation encore plus fâcheuse. Cette administration avoit cependant reçu depuis 1789 des améliorations de la plus grande importance, soit dans l'emploi des fonds, soit dans le régime intérieur; mais déjà en 1811 l'état des finances empêcha le gouvernement d'assigner à ce service les sommes qui devoient y être consacrées. Le décret du 19 janvier 1811 n'accorda que quatre millions pour la dépense des enfans trouvés de tout le royaume, dépense qui s'élève annuellement à neuf millions. Les hospices de París avoient déjà, au commencement de 1813, un déficit présumé de 210,000 fr., et ce déficit s'est prodigieusement accru depuis cette époque par le placement des malades militaires dans les hôpitaux civils, et le non paiement des journées de ces malades. Le ministère de la guerre doit aux hôpitaux de Paris, pour ce seul objet, une somme de 1,395,365 fr. 60 cent. Les magasins, les pharmacies, etc., sont épuisés; les fonds de réserve des établissemens en meubles, linges, etc., sont usés ou perdus; la valeur de ces pertes n'a pu être encore calculée, mais elle s'élève à plusieurs millions......

— « Mais les soins de ce gouvernement ne se borneront pas au rétablissement d'une prospérité purement matérielle : d'autres sources de bonheur et de gloire ont été cruellement attaquées. La morale comme

la richesse publique ne sauroit échapper à l'influence funeste d'un man→ vais gouvernement. Celui qui vient de finir a comblé dans ce genre les maux qu'avoit causés la révolution; il n'a rétabli la religion que pour en faire un instrument à son usage.

» L'instruction publique, soumise à la même dépendance, n'a pu répondre aux efforts du corps respectable qui la dirige; ses efforts ont été sans cesse contrariés par un despotisme qui vouloit dominer tous les esprits pour asservir sans obstacle toutes les existences; l'éducation nationale a besoin de reprendre une tendance plus libérale, pour se maintenir au niveau des lumières de l'Europe, en revenant à des principes trop long-temps oubliés parmi nous.

>> Que ne peut-on rendre aussi tout d'un coup à la France ces habitudes morales et cet esprit public que de cruels malheurs et une longue oppression y ont presqu'anéantis! Les sentimens nobles ont été opprimés; les idées généreuses ont été étouffées : non content de condamner à l'inaction les vertus qu'il redoutoit, le gouvernement a excité et fomenté les passions qui pouvoient le servir pour éteindre l'esprit public, il a appelé à son aide l'intérêt personnel; il a offert ses faveurs à l'ambition pour faire taire la conscience; il n'a plus laissé d'autre état que celui de le servir, d'autre espérance que celle qu'il pouvoit seul réaliser; aucune ambition n'étoit indiscrète, aucune prétention ne sembloit exagérée : de là cette continuelle agitation de tous les intérêts et de tous les désirs; de là cette instabilité dans les situations qui ne laissoit presqu'à personne les vertus de son état, parce que chacun ne songeoit qu'à en sortir; de là enfin des attaques sans cesse livrées à tous les genres de probité par des séductions dont les caractères les plus généreux avoient peine à se défendre.

» Ce sont les tristes effets de ce systême corrupteur que nous avons aujourd'hui à combattre : ne nous en dissimulons pas l'étendue; il est des époques où les peuples, comme les rois, ont besoin d'entendre la vérité, dût-elle même paroître triste et sévère nous n'avons pas craint de vous la dire. Les embarras du moment sont pénibles, les difficultés sont grandes; il y aura beaucoup à attendre du temps; la nation sentira que le concours de son zèle est nécessaire pour hater le retour de son propre bonheur : sa confiance dans les intentions de son Roi, les lumières et la sagesse des deux chambres, rendront la tâche du gouvernement moins longue et plus légere. Si quelque chose pouvoit empêcher que ces espérances se réalisassent promptement, ce seroit cette turbulence inquiète qui veut jouir sans retard des biens qu'elle entrevoit; mais votre prudence saura nous en préserver.

>> Si les impôts n'étoient pas payés, les dettes s'accroîtroient, et l'insuffisance des ressources ne permettroit pas de diminuer les contributions. Si l'union générale ne secondoit pas les vues bienfaisantes de notre Roi, des entreprises utiles seroient arrêtées, d'importantes améliorations seroient suspendues, et l'impossibilité de faire le bien accroîtroit le mal déjà fait.

>> En regrettant les biens qui doivent encore se faire attendre, jouissons de ceux qui nous sont offerts : déjà la paix rouvre nos ports, la liberté ramène les négocians à ses spéculations, et l'ouvrier à ses tra

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vaux; un principe de vie circule dans tous les membres du corps politique; chacun voit la fin de ses maux, et entrevoit d'heureuses destinées. Pourrions-nous être indifférens à ce repos de l'avenir, après avoir vécu si long-temps de tourmens et d'inquiétudes? Vous n'y serez point insensibles, Messieurs. Le Roi se confie également à ses peuples et à leurs Députés, et la France attend tout de leur généreux accord. Quelle circonstance plus heureuse que celle d'une assemblée qui a si bien mérité de la patrie, et d'un Roi qui veut en être le père! Jouissez, Messieurs, de cette heureuse réunion; voyez ce que la France en espère, ce que vous avez déjà fait pour elle; que ces heureux commencemens vous encouragent dans votre carrière, et que la reconnoissance de vos derniers neveux soit à la fois votre émulation, votre gloire et votre récompense.

Le Roi a eu, le 12, un accès de fièvre qui l'a empêché d'assister à la messe. Il paroît que S. M. est mieux. On espère que cette indisposition n'aura pas de suite.

Un voyageur qui se rend aux eaux de Néris, dans le Bourbonnois, nous a transmis des détails sur le passage de Mme. la duchesse d'Angoulême. Les Bourbonnois se sont montrés dignes de leur nom. A l'entrée de la Princesse dans le département, un bon maire de village est venu la complimenter, à la tête d'une troupe de jeunes filles vêtues de blanc. Des bergers ont exécuté une danse et un petit concert. A Moulins, dix-huit matelots, récemment délivrés des prisons d'Angleterre, ont voulu traîner la voiture, en reconnoissance des bontés que S. A. R. leur avoit témoignées dans leurs prisons. Les habitans de la ville avoient orné leurs maisons, comme à Paris. Ça été pour eux un jour de fête. Des guirlandes, des drapeaux blancs, un arc de triomphe, et encore mieux, l'allégresse sur toutes les figures, témoignoient assez que Moulins partageoit les sentimens de tous les bons Francois.

LIVRES NOUVEAUX.

Le Tour du Cercle, ou Tableau de nos erreurs et de nos crimes ; brochure in-8°.

Nous en rendrons compte incessamment.

Notice historique et chronologique sur le Sacre et le Couronnement des Rois de France par M. l'abbé Dufrêne. Se trouve au bureau du Journal; et à Saint-Jean-d'Angely, chez Mme. Lacurie, imprimeur; prix, 75 c., et franc de port, 8o c.

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