longue hilarité dans la chambre. Quelques députés s'écrient : Il a toujours un Jésuite dans la gorge. Ñ. Jacqueminot retire son amendemept. La chambre adopte, suivant les conclasions de la commission , et malgré les observations de MM. de Caux et Hygonnet, une réduction de 239,000 fr. sur les états-majors. La réduction de 105,954 fr., proposée par la commission sur les camps de maneuvre, est rejetée après 2 'épreuves. Une autre réduction de 60,000 fr. sur les traitemens de l'intendance militaire , portés à 2,306,000 fr. , et une de 40,00ð fr. sur les 1,575,000 fr. de traitemens d'états-majors de place, sont ensuite adoptées, quoique combattues par le ministre. Le 19, M. Lepelletier d'Aulnay fait le rapport de la commission qui a été chargée de l'examen du projet de loi sur la dotation de la pairie. Il conclut à l'adoption du projet, en supprimant les art 4, 5 et 6. MM. Dupont (de l'Eure), de Sade et Andréossy font un rapport de pétitions. Le sieur Hue-Sallé se plaint de soustractions d'effets de commerce contenus dans des lettres confiées à la poste. Ces billets, montant à 7748 fr., ont été payés à un individu se disant demeurer à Vaugirard. M. le marquis de Vaulchier rappelle que la poste n'a aucun moyen de suivre les traces des lettres qui lui sont confiées, lorsqu'on ne les fait pas charger, et que les soustractions, qui sont d'ailleurs fort rares, peuvent se commetire par les portiers ; les domestiques ou les commis auxquels les lettres sont remises. Il annonce, au reste , que tous les moyens judiciaires et de po ice ont été employés pour rechercher les coupables, en supposant que la déclaration du pétitionnaire soit véritable. M. Crignon de Montigny ne suspecte pas plus la pro. bité des employés de la posle que l'allégation du plaignant; mais il croit qu'on pourroit attribuer le fait au cabinet noir M. de Formont se plaint de ces réclamations qu'on fait à l'envi contre une administration aussi bien tenue, et qui a un chef si respectable. Il raconte qu'une lettre contenant des valeurs, pour laquelle il avoit fait des réclamations, fut retrouvée long-temps après chez lui, dans des papiers où son portier l'avoit glissée par mégarde. Quant au monopole'de celte administration, l'orateur soutient qu'on ne sauroit y renoncer. M. B. Constant appuie avec chaleur ces nouvelles plaintes. M. le ministre des finances assure que tous les moyens de surveillance possibles sont employés , que le cabinet noir n'existe point. Avant d'accuser l'administration des postes , il auroit fallu avoir des preuves que la soustraction provient de ses agens. Il est d'un bon esprit , ajčute S. Exc., de dénoncer les abus ; mais il ne faut pas les exagérer : ceux dont il s'agit ne sauroient d'ailleurs être plus rares. M. Laisné de Villevêque défend la pétition. M. Jacquinot-Pampelune annonce qu'il a fait faire une instruction judiciaire. M. Pe. tou voudroit que l'on ajournât cette affaire au samedi suivant, parce qu'il y aura des réclamations semblables. Le renvoi au ministre des finances est prononcé, suivant les conclusions de la commission. La chambre renvoie au garde-des-sceaux une autre pétition d'un sieur Terát, employé de la poste , qui voudroit qu'il existåt . vine punition contre les individus autres que les employés qui se permettroient d'ouvrir des lettres. Elle passe à l'ordre du jour, d'après les explications de M. de Curzay, préfet , sur une réclamation de deux élecreurs d'Ille-et Villaine, qui se plaignent d'avoir été privés du droit de voter. M. l'abbé Joffroi, curé à Joigny, demande qu'on améliore le sort des prêtres - sexagénaires. Renvoi au ministre des affaires ecclésiastiques. Le sieur Pfaffenhoffen demande de nouveau le remboursement des sommes qu'il dit avoir prêtées aus princes pendant la révolution. La commission propose le renvoi au ministre des financès. S. Exc. annonce que le Roi a nommé une commission pour examiner les créances de cette nature. L'ordre dn jour est prononcé. Une autre réclamation sur les domaines du prince de Conti a le même sort , après quelques débats.. La chambre renvoie aux ministres de l'intérieur, du commerce et de la justice plusieurs pétitions contre les abus du colportage. Elle prononce l'ordre du jour sur celle d'un sieur Anduze, qui sc plaint de ce que, malgré le concordat, les fêtes supprimées sont fèiées le jour même, et qui demande que les cérémonies de l'Eglise soient gratuites. Le 21, l'affluence est extrêmement nombreuse; la tribune des pairs est remplie. M. le duc de Chartres est présent. M. Girod (de l'Ain) fait le rapport de la commission qui a examiné la proposition de M. Labbey de Pompières. M. le rapporteur rend compte des opérations de la commission.. Elle a cru devoir demander aux ministres actuels des renseignemens précis sur l'admission des Jésuites, sur les instructions données aux présets pour les élections, sur la concession d'un domaine de l'Etat au Calvaire et celle de l'ancienne Chartreuse, diocèse de Grenoble, sur la restitution de forê!s à des fabriques et aux cathédrales Reims et Châlons, sur le port gratuit des journaux et pamphlets, le rapport au Roi sur la garde nationale, l'arrestation de Caron, la détention de plusieurs habitans de la Martinique, etc. M. Portalis a répondu, au nom de ses collègues , que des motifs de l'ordre le plus élevé ne leur permettoicnt pas de donner communication des documens demandés. Ici M. Girod (de l'Ain) prend en particulier chacun des 17 faits examinés par la commission, et rend compte des divergences d'opinions qui ont eu lieu sur ces faits : 4 membres ont été d'avis que la censure avoit été établie à propos; 8 ont pensé que le dernier ministère n'avoit pas traité défavorablement les protestans ; 3 membres ont déclaré qu'il n'étoit pas coupable dans l'affaire des troubles de la rue Saint-Denis, mais la majorité a pensé le contraire; la majorité a reconnu que les Jésuites n'avoient pas été introduits par le dernier ministère. Lorsqu'il s'est agi de prendre un parti sur la question de savoir s'il y avoit lieu à accusation , 3 membres ont réponda non; 2 ont répondu non , avec réserve de blâme ; 4, oui , avec réserve d'instruire, En conséquence, au nom de la majorité de la commission, M. le rapporteur, après avoir demandé qu'il fût procédé à un plus ample informé et qu'on déterminât les formes pour l'enquôle générale, pro. pose à la chambre de déelarer qu'il y a lieu à instruire sur l'accusation de trahison et de concussion portée contre les membres du dera pier ministère. Après la lecture de ce rapport, M. de Montbel demande que l'on fixe la discussion immédiatement après la loi en délibération (les dépenses du budget ). Cette proposition est rejetée par une majorité composée des deux parties de la gauche, plus 24 membres du centre droit. M. le président met aux voix la guestion de savoir si on s'occupera de cette affaire après la délibération sar la loi des recettes. La même majorité se levant pour ce parti, il est adopté. La plus grande agitation règne ensaite dans la salle. La séance se termine par l'adoption de plusieurs chapitres du budget de la guerre. Cinquanle membres se sont fuit inscrire pour l'accusation, et 15 contre. C'est par erreur que nous avions dit, po 1452, que l'élection de M. O'Connell étoit terminée à Clivre ; elle ne l'a été que le samedi 5. M. O'Connet a réuni 2057 votes, et M. Fitz-Gérald gáz; ainsi le premier a eu une majorité de 1075 votes. Ce résultat étoit prévu depuis long-temps. Les paysans irlandais étoient presque ious pour M. O'Connell. Les fermiers mêmes de M. Fitz-Gérald ont voté contre lui. On dit que les membres du clergé catholique d'Irlande ont eu beaucoup de part à la victoire de M. O'Connell. Le Père Maguire, religieux Franciscain, s'est donné beaucoup de mouvemens en så faveur. Il a harangué le peuple plusieurs fois, et comme il a de l'influence en Irlande, à cause de ses sermons et de la.controverse qu'il a soutenue à Dublin contre un ministre protestant, ses discours n'ont pas peu contribué à échauffer les esprits. Le Père Lestrange, Carme, s'est distingué aussi par son zèle. Les amis de M. O'Connell, les membres de l'association catholique, ceux qu'on appelle les libérateurs, se relevoient pour haranguer le peuple. Les francs tenunciers des paroisses arrivoient par troupes, ayant leurs pasteurs à leur tête. Les propriétaires osoient à peine manifester leur mécontentement; l'exaltation des esprits est telle qu'il est difficite, qu'il n'y ait pas quelque crise. Il y a eu une protestation de 38 francs tenanciers contre l'élection; ils disent que M. O'Connell étant catholique, son élection est nulle, et que M. Fitz-Gérald doit être proclamé. Mais il a été décidé que l'élection de M. O'Connell étoit valable, au moins jusqu'au moinent où son refus de prêter les sermens requis l'empêcheroit de siéger au parlement. و Au milieu des discussions qui se succèdent rapidement, nous avons été contraint de laisser en arrière quelques discours qui auroient mėrité d'être cités au moins par extraits. Nous aurions désiré, entr'an tres, pouvoir noas arrêter sur le discours prononcé par le marquis, de Villefranche, dans la séance du 18 juin, relativement au projet de loi sur les listes électorales. Le noble pair remarquoit avec dou leur que ce projet de loi diminuoit l'influence de l'adıninistration, en même temps qu'il augmentoit celle du comité directeur et de ses agens. Il existe dans cette loi un principe de méfiance contre tous les fonctionnaires, on donne aux tribunaux un pouvoir politique, oni affoiblit l'autorité royale, et c'est le ministère du Roi qui vient proposer de telles lois ! M. le marquis de Villefranche s'alarme de ces concessions, et des dangers qui en peuvent résulter. Il finit par citer quelques passages des discours prononcés en ! 820 par MM. Siméon, Laine et de Serre, et où ces orateurs insistoient sur la nécessité de réprimer l'influence du parti démocratique. Comment se fait-il qu'arıjourd'hui on se jette aveuglément dans un système contraire ? Tout ce discours de M. de Villefranche est plein de sagesse et de saison. Le noble pair regrettoit d'être forcé de voter contre la loi nourelle; mais les intérêts de la monarchie lui paroissoient commander cet!e opposition Un autre discours fort solide, que nous avons reçu, est celui de M. Duplessis de Grénédan, à la chambre des députés, séance de 19 juin, contre le dernier article du projet de loi sur la presse. L'oratear a rappelé les maux qu'a produits' la licence de la presse; il a signalé son audace croissanie et ses progrès, qui deviennent chaque jour plus inquiétans, et s'est étonné que, précisément dans ces circonstances, on otát tout frein aux journalistes, que l'autorité abdiquât ses droits, qu'elle laissat pleine carrière à ceux qui voudront prêcher l'impiété et la révolte, qu'elle se liát elle-même les mains. L'orateur a fait entendre tour à tour le langage de l'expérience, de la raison, de la religion; faudra-t il donc qu'une expérience nouvelle et tardive .vienne apprendre aux gouvernemens leur intérêt, lenr droit et leur devoir ? Le discours de M. Duplessis de Grénérian, én 42 pages in 8°, est une réclamation judicieuse et forte contre un inexplicable aveuglément. Un autre orateur s'est élevé, le 12 juillct, dans la chambre des pairs, contre le même projet de loi. M. le comte de Marcellus a rassemble, dans un discours très-court, les considérations les plus propres à faire impression. Le premier devoir de l'autorité est de prévenir les crimes, ce qui vaut encore encore miens que d'être réduit à les punir; elle doit préserver la littérature de l'oppression ou la tient la licence de la presse, et réprimer les écarts de l'imprévoyance ou les excès de la perversité. L'écrivain sage ne redoule pas la censure, et ceux qui ne respectent rien dans leurs ouvrages rendroient grâces à une sévérité qui leur épargneroit des remords. On nous réproché, a dit l'orateur, des craintes exagérées; hélas! la licence ne les justifie que trop. Voulez-vous savoir, ix-t-il dit en finissant, ce qui est le plus avantageux à la patrie ? Songez à ce que craint et à ce que desire votre ennemi; si vous le consultiez sur la mesure proposée, il vous conseilleroit de l'adopter; vous allez donc faire précisément ce qu'il souhaite. Cette règle peut s'appliquer à toutes les coneessions. Enfin un autre discours prononcé par M. le marquis de Villefran- che dans la même discussion, n'est pas moins remarquable que les précédens. Le noble pair s'exprimoit ainsi : « Mais qui pourroil douter que nous sommes entrainés dans de nouvelles calamilés, lorsque nous voyons le ministère ne pas s'arrêter dans ce fatal système de concessions faites à un parti dont les doctrines sont dangereuses, et qui, à ce prix , lui a offert son appui; et puisque j'en suis sur le chapitre des concessions, la dernière qu'il lui à faite est immen:c; elle a amigé l'épiscopat et tous les catholiques en France , puisque c'est un commencement de persécution dirigée contre des prêtres français, et cela, à ce que l'on dit, pour rentrer dans le sysièmę légal; ainsi vous êtes entrainés à cominencer lcur proscription, puisque vous exigez d'eux une déclaration signée pour affirmer qu'ils ne sont affiliés à aucune congrégation religieuse. Qui croiroit que, sans même nommer le nom de Jésuite dans lesdites ordonnances du 16 juin dernier, on soit parvenu à proscrire des prétres français soumis à la juridiction spirituelle des évêques, et employés par eux à l'instruction dans leurs petits séminaires ? Ainsi des juifs, des mahométans, des anabaptistes, des quakers et toutes les sectes qui peuvent exister, auront la liberté de pratiquer leurs croyances dans leur domicile et seront prolégés par les lois, et des prêtres français, désignés sous le nom de Jésuites, ne l'auront pas sans être soumis á des déclaraliuns siguées par eux. » La liberté des cultes, garantie par l'article 5 de la Charte, est violée à leur égard, sous le prétexte spécieux que d'anciens arrêts des parlemens, qui datent de plus de soixante ans, doivent avoir encore force de loi, et peuvent leur être appliqués pour les proscrire; mais toute cette législation a été détruite par les lois de la révolution et par l'article 5 de la Charte, qui s'exprime ainsi : Chacun professe sa religion avec une égale liberté, et obtient pour son culte la même protection. Ainsi la Charte garantit à tous les Français le libre exercice de leur religion; cela est évident pour des esprits non prévenus; les conséquences d'une telle mesure, par le mal qu'elle fera à la religion et à l'éducation en France sont immenses. Ce que. le gouvernement impérial avoit toléré et laissé établir en France plusieurs années avant la restauration, dans l'intérêt de la religion et de l'éducation; ce que, depnis la restauration, toutes les précédentes administrations avoient maintenu, est proscrit par le ministère actuel sous le gouvernement légitime des descendans de saint Louis! Non, l'on ne pourroit le croire , si nous n'en étions les témoins. » L'orateur rappelle les désastres de la révolution, suite de la licence des doctrines et de la foiblesse de l'autorité, et cite encore des discours prononcés en 1817 par MM. Decazes et Pasquier contre les excès de la presse. Il n'y auroit guère de réponse plausible à faire à tout cela; mais le parti qui triomphe va en avant sans se soucier des objections de la sagesse et des craintes de l'expérience. a La Lettre de M. l'évéque de Chartres à Mide vatismenil, insérée dans notre dernier numéro, se trouve à Chartres, chez Labalte, et à Paris, chez Adr. Le Clere et compagnie, au bureau de ce journal. Prix , 50 cent. et 55 cent. franc de port. |