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la tonsure et l'habit clérical, et qu'outre la grammaire on les forme peu à peu aux connoissances et aux pratiques qui conviennent à l'état ecclésiastique. Assurément, en parlant d'enfans de 12 ans, le concile n'entendoit

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les ihéologiens ni même les étudians en philosophie, et tout ce chapitre ne peut avoir trait qu'à la formation des petits séminaires.

Il n'est pas plus exact de dire qu'avant le commencement de ce siècle on n'avoit point entendu en France parler de petits séminaires. L'abbé Fleury, dans son 50 discours sur l'histoire ecclésiastique, dit que la discipline des collèges formés au 13° siècle tendoit non-seulement à l'instruction des écoliers, mais à régler leurs moeurs et à les former à la vie cléricale; c'étoient, ajoute-t-il, comme de petits séminaires. L'assemblée de Melun en 1579 invita les évêques à remplir les vues du concile de Trente, la nécessité des temps, disoitelle, et la pénurie des cleres l'exigent; elle recommandoit de n'admettre que ceux qui avoient au moins 12'ans. Ce fut un petit séminaire que saint Vincent de Paul établit en 1635 au collège des Bous-Enfans. L'historien de sa vie, Collet, dit positivement que le saint suivit le plan du concile de Trentes, et commença à recevoir des enfans de 12 ou 14 ans. S'il modifia ensuite ce plan, et s'il forma de préférence des séminaires pour la théologie, c'est qu'alors la première éducation n'étoit pas à beaucoup près ce qu'elle est aujourd'hui. Les collèges dirigés par des ecclésiastiques ou par des hommes religieux n'éloignoient pas comme aujourd'hui les jeunes gens de la vocation sacerdotale ; ils y préparoient au contraire les enfans par l'habitude des pratiques de la religion et par l'esprit général qui dominoit dans la société et qui en animoit toutes les classes. On avoit donc bien moins besoin alors d'écoles spéciales pour le clergé.

Toutefois le roi et les évêques concouroient pour l'établissement des petits séminaires. Louis XIV, par sa déclaration du 15 décembre 1698, enregistrée au parlement, exhortoit les évêques et leur enjoignoit d'établir, dans les diocèses où it y avoit déjà des séminaires pour les.clercs plus âgés, des maisons particulières pour l'éducation des jeunes clercs pauvres depuis l'âge de 19 ans. C'étoient là, sans doute, des petits séminaires comme nous les entendons aujourd'hui. Il se forma successivement, à Paris et dans les provinces, des

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établissemens de ce genre. A Paris, les communautés formées par M. de la Barmondière, curé de St-Sulpice, par l'abbé Traullé, par l'abbé de Chansiergues, n'étoient autre chose que des petits séminaires; on y préparoit de bonne heure les enfans aux pratiques de la vie cléricale. Chansiergues avoit établi trois associations de pauvres écoliers qu'il réunit ensuite. Un docteur de Sorbonne, l'abbé Gillot, forma aussi une communauté semblable, qui subsista assez . long-temps. Dans les provinces, le zèle des évêques donna naissance à des écoles du même genre. Ainsi, dans le diocèse d'Orléans, le collège de Meung-sur Loire n'étoit autre qu'un petit séminaire qui a subsisté jusqu'à la révolution. De bons curés prenoient plaisir à réunir des jeunes gens et à les élever pour l'état ecclésiastique; rien n'étoit si fréquent autrefois dans les campagnes, et beaucoup de prêtres sont sortis de ces écoles privées et temporaires, que les universités de ce temps-là ne songeoient pas à entraver.

Toutefois, à mesure que l'éducation publique se détérioroit, on sentit le besoin de multiplier et de régulariser ces établissemeos. Depuis la destruction des Jésuites surtout, les collèges étant moins bien tenus, et l'esprit d'indifférence ou même d'irréligion y pénétrant de plus en plus par la négligence des maîtres, par l'introduction des mauvais livres et par toutes les séductions de l'esprit qui commençoit à dominer dans la société, les petits séminaires devenoient plus que jamais nécessaires. Aussi cet objet attira l'attention de l'assemblée de 1775, et nous trouvons dans ses procès-verbaux un mémoire et une délibération sur ce point. L'assemblée invita les évêques à procéder à l'établissement des petits séminaires. Plusieurs diocèses remplirent ce vou et en recueillirent le fruit. Dans l'assemblée de 1785, on revint encore sur ce sujet, et M. Dulau, archevêque d'Arles, fit, le 5 septembre 1786, un rapport sur l'établissement des petits séminaires. Ce rapport se trouve dans ses OEuvres, tome (, page 408; et au tome II est un autre mémoire où l'on montre l'utilité et l'importance des petits séminaires. On y parle, entr'autres, des heureux résultats qu'avoit produits un petit séminaire établi récemment à Châlons. Dans le synode de Toulouse en 1782, on arrêta le plan d'un petit séminaire, absolument dans le même genre de ceux que pous avons aujourd'hui; enfin, peu avant la révolution, on

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avoit formé à Paris, près St-Sulpice, la petite communauté des clercs, dirigée par M. Dubourg, actuellement évêque de Montauban, et qui a donné à l'Eglise des prêtres zélés et même des martyrs.

C'est donc fort légèrement que l'auteur des Nouvelles Reflexions suppose qu'on n'avoit pas entendu parler de petits séminaires avant le commencement du 19e siècle. Il ajoute que leur établissement étant dû à l'esprit irréligieux du siècle, ils seroient inutiles, si cet esprit venoit à changer; conime rien malheureusement n'annonce un tel changement, comme au contraire cet esprit irréligieux fait chaque jour des progrès effrayans, il n'est pas probable que les petits séminaires deviennent de si tôt inutiles. Quelles seroient les ressour. ces de l'Eglise pour la perpétuité du sacerdoce, si elle n'en avoit à attendre que des établissemens, universitaires ? C'est une vérité de fait, dit un Mémoire que nous avons sous les yeux, Mémoire rédigé en 1817 par un ecclésiastique distingué, aujourd'hui évêque; c'est une vérité de fait, qu'il pe se forme point dans les 36 collèges royaux d'élèves pour l'état ecclésiastique; c'est également une vérité de fait qu'en général il ne s'en forme qu'un petit nombre dans les collèges communaux et les pensions. Ce sont là des faits positifs et notoires, et on ne conçoit pas comment l'auteur des Nouvelles Réflexions a pu dire que, depuis 1809, les institutions et les collèges communaux avoient donné plus de prêtres que tous les petits séminaires ensemble. Il étoit difficile d'imagia ner une assertion qui fût plus aisément démentie par l'expérience de tous les diocèses.

Enfin une autre assertion de l'auteur n'est pas moins. étonnante; il dit que, d'après les états adressés par les évêques, le nombre des théologiens dans les grands séminaires est à peu près le même cette année qu'en 1821. Or, en consultant l'Almanach du clergé de 1822, je vois qu'il y avoit dans les séminaires, au 1er janvier 1821, 5848 théologiens, et dans l’Almanach du clergé de cette année, il y en a 9285; ce qui fait une différence de 3437, différence qui n'est pas si petite, à ce qu'il semble. Comment l'auteur a-t-il donc pu ajouter hardiment qu'il ne s'étoit guère plus manifesté de vocations sacerdotales dans un temps que dans l'autre? Est-ce que trois mille prêtres de plus ne lui paroissent rien? Cette différence entre le nombre des étudians en 1821 et

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1828 est encore plus sensible pour les élèves des petits seminaires; on comptoit en 1821 1182 philosophes, 12,904 jeunes gens dans les petits séminaires, en tout 13,386, tandis que, dans l'Almanach du clergé de 1828, on compte 3725 philosophes et 21,118 étudians dans les petits séminaires, en tout 34,843 jeunes gens, ce qui fait une différence de 11,457 entre le nombre de 1821 et Ic nombre actuel.

Mais indépendamment de ces inexactitudes et de ces méprises, tout le plaidoyer de l'auteur contre les petits semiDaires est bien déplacé dans les circonstances présentes. Il est même en contradiction avec le rapport de M. l'évêque de Beauvais au Roi, publié en tête de l'ordonnance du 16 juin. Le prélat y insistoit sur la pécessité des écoles ecclésiastiques :

« Dins de telles conjonctures, disoit-il, on ne pouvoit, sans compromettre le sort de l'église de France, s'en tenir à l'usage généralement suivi autrefois. Il étoit facile de prévoir que, dans l'état actuel des choses, s'il n'y avoit que les écoles ordinaires pour cultiver les disposilions naissantes des jeunes lévites, la plupart des vocations devant se trouver comme étouffées dans leur germe, c'en étoit fast de la tribu sainte, et par conséquent de la religion catholique dans le royaume très-chrétien... Ainsi le grand motif de l'épiscopat, en demandant la faculté de créer de nouvelles écoles spéciales pour les élèves ecclésiastiques, étoit manifestement puisé dans la plus impérieuse de toutes les nécessités, celle de sauver le sacerdoce près de périr. »

L'auteur des Nouvelles Réflexions contredit donc M. l'é vêque de Beauvais en attaquant les petits séminaires. Il y a même, dans cette partie de sa brochure, une teinte d'ironie qui sied mal à la gravité du sujet : aussi son apologie, outre qu'elle est inexacte sur plusieurs points, déplaira encore sous d'autres rapports au clergé. Il est à craindre que les ennemis de la religion n'aillent y chercher des armes contre des institutions précieuses et nécessaires qu'a formées le zèle, que soutient la charité, que l'autorité doit protéger, et qui

, ne peuvent paroître ridicules qu'à des esprits frivoles ou indifférens aux maux de l'Eglise.

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NOUVKLLRS KCCLÉSLASTIQUES,

Paris. Dans toutes les grandes crises de la religion, c'est la coutume que les évêques élèvent la voix , soit pour éclairer les fidèles, soit pour avertir l'autorité, soit pour défendre les droits de l'Eglise, soit pour protester contre des mesures inquiétantes. A l'époque de l'orage qui éclata contre les Jésuites, il y a plus de 60 ans, des assembiées du clergé prirent hautement leur défense, et un grand nombre d'évêques publièrent des écrits sous diverses formes en faveur d'un corps injustement attaqué. Ces réclamations sont des monumens pour l'histoire de l'Eglise; elles attestent le zèle

autant que la sagesse du clergé. L'épiscopat actuel n'est * ni moins pénétré de ses devoirs, ni moins empressé à dé

fendre ses droits. On assure que des représentations fortes et respectueuses ont été adressées ces jours derniers au Roi, sur les ordonnances du 16 juin; ces représentations avoient été dressées dans les réunions d'évêques qui ont eu lieu. Elles sont signées, dit-on, du doyen des évêques de France au nom de tous ses collègues. On ajoute que les évêques dispersés dans les provinces oot adhéré aux résolutions prises à Paris, et on s'attend à voir publier dans quelque temps leurs déclarations et protestations, qui tiendront leur place parmi les plus importantes de l'histoire de notre époque.

Nous avions annoncé qu'il existoit un projet pour saụ. ver d'une destruction totale des établissemens utiles, et pour remplacer les Jésuites par des ecclésiastiques soumis au régime universitaire. Ce projet, qui ne regardoit que St-Acheul, à rencontré des obstacles inattendus. Nous avouons que nous le regrettons dans l'intérêt des familles : tout en déplorant le renvoi des Jésuiteș, il vous paroissoit désirable de voir subsister quelque chose d'un établissement qui avoit rendu tant de services. On a dit que ce seroit là une sangtion publique de l'iniquité, un acte de foiblesse , et pis que de la foiblesse; qu'alors le dépouillement des évêques deviendroit légal et la violence légitime. Nous ne voyons pas comment c'eût été légitimer la violence et sanctionner l'iniquité que de chercher à atiénuer une mesure désastreuse ; nous ne voyons pas comment le dépouillement des évêques fût devenu légal, parce qu'ils eussent mis des ecclésiastiques à la place des Jésuites. Quand ceux-ci furent renvoyés de leurs collèges il y a soixante ans, on ne crut pas que ce fut une foiblesse et pis qu'une foiblesse de ménager le bienfait d'une éducation religieuse aux enfans qui perdoient leurs

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