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tution, que M. Say a considérée comme un -moyen dispendieux et vexatoire de dépraver les facultés intellectuelles des jeunes gens, c'est-à-dire, de remplacer dans leur esprit de justes notions des choses, par des opinions propres à perpétuer l'esclavage en France; et MM. les rédacteurs du Journal Général la prennent sous leur protection, en éxaltant les principes éminemment monarchiques du grand-maître, principes que Bonaparte savait si bien apprécier et récom

penser.

Ils trouvent que la chambre des députés donne à ses séances une trop grande publicité, sur-tout quand elle permet que les propositions qui sont faites dans son sein soient développées publiquement. Cette publicité qui leur paraît contraire à la charte, est, suivant eux, d'autant plus dangereuse, que les propositions ne peuvent être combattues qu'en comité secret, et que le public se retire avec l'impression fâcheuse qu'il a

reçue.

Ils trouvent une grande analogie entre les gens de lettres et les représentans de la na

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tion: les premiers exercent sur le public. une influence qui n'est pas moins grande que celle qu'exercent les seconds; et ceci explique pourquoi, ayant obligé les députés à discuter au comité secret les propositions qui ne leur viennent pas du gouvernement, on a voulu que les auteurs ne pussent faire connaître leurs opinions au public qu'après les avoir communiquées à des agens du ministère. Tout cela est évidemment la suite du même systême.

Un penchant que MM. les rédacteurs du Journal général cherchent à détruire, c'est l'habitude qu'on paraît avoir contractée de préférer ce qui est utile à ce qui est beau. Ces messieurs paraissent trouver fort étrange qu'on mette quelque prix à l'économie politique; à cette science ignoble qui nous apprend à apprécier la valeur des choses, qui - met la valeur dans l'utilité, et qui porte les gouvernemens à préférer le bonheur des peuples à des arcs de triomphes, à des pyramides et à des châteaux. « Le beau, disent

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ils, partout méconnu, quelquefois même » avili et tourné en ridicule, n'a plus trouvé

» que de rares et stériles admirateurs ; et » l'utile avec ses arides calculs, avec ses ré>>sultats si froidement positifs, avec ses ac>>cessoires si odieux ou si dégoútans, a ab>>sorbé toutes les pensées, a mérité tous les >> hommages. » Si ces principes sont ceux du ministère, dans peu de temps la France peut se promettre de voir de belles choses; car elle sera singulièrement administrée.

Il serait difficile, au reste, de bien saisir la physionomie d'un journal qui se fait un devoir de présenter le pour et le contre, et qui réfute aujourd'hui ce qu'il avait demontré hier. Avec un pareil systême, on ne peut jamais être convaincu d'avoir mal raisonné, ou d'avoir soutenu un mauvais parti; puisqu'on peut toujours être supposé avoir en porte-feuille des articles qui réfutent ceux qu'on a déjà publiés.

Supposez que tous les rédacteurs de journaux eussent suivi la même méthode, quels avantages n'en auraient-ils pas retirés? Ei, après avoir traversé la révolution, on les avait accusés d'avoir été tour-à-tour les apôtres de la liberté ou les suppôts du despotisme,

d'avoir outragé ou flagorné les mêmes hommes selon les circonstances; enfin, d'avoir été constamment du parti du plus fort, ils auraient repoussé toutes ces accusations injurieuses, en disant qu'ils étaient restés fidèles à leur esprit, et qu'ils avaient toujours dit le POUR et le CONTRE. Ils auraient donc traversé la révolution sans rien perdre, ni de leur innocence.... ni de leurs salaires.

MM. les rédacteurs du Journal général peuvent donc, en se tenant derrière leur prospectus, crier tour-à-tour vive le Roi, vive la ligue, sans avoir à craindre d'être accusés de versatilité; cependant il me semble que cette considération devrait les faire renoncer à leur devise, ou les obliger du moins à la modifier. N'est-il pàs désagréable, en effet, après avoir lu en tête d'un article, vérité, impartialité, de lire encore le lendemain vérité, impartialité, en tête d'un article qui dit précisément le contraire? Il semble qu'il faudrait au moins prévenir ses lecteurs ; il est vrai qu'alors tous les avantages du POUR et du CONTRE seraient manqués.

TOME II.

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JOURNAL DES DÉBATS.

BONAPARTE, aussitôt qu'il eut été fait consul, annonça que la révolution était finie. Il était difficile de débuter par un acte plus vain et plus ridicule, et l'on aurait déjà pu reconnaître, dans ce premier trait, l'homme qui depuis proclama tant d'orgueilleuses extravagances. Si cette annonce n'était que la déclaration de ce qui se passait, elle était absolument inutile; si elle n'était point l'expression de la vérité, elle était encore plus vaine; car que pouvait-elle changer à l'état des choses? Le consul se montrait déjà plus fat et plus fou que l'empereur ne l'ait jamais été, s'il pouvait croire que son élévation devait être nécessairement le terme de nos agitations politiques, ou qu'il lui suffisait, pour rétablir l'ordre, de déclarer qu'à l'avenir tout serait calme et tranquille. Quelques personnes ont supposé qu'il avait eu une

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