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« Appelé par la Providence et la volonté de la nation à constituer cet empire, ma marche a été graduelle, uniforme, et analogue à l'intérêt de mes peuples. Dans peu d'années, ce grand oeuvre sera terminé, et tout ce qui existe, complétement consolidé.

<< Tous mes desseins, toutes mes entreprises n'ont qu'un but, la prospérité de l'empire, que je veux soustraire à jamais aux lois de l'Angleterre.

« L'histoire, qui juge les nations comme elle juge les hommes, remarquera avec quel calme, quelle simplicité, quelle promptitude, de grandes pertes ont été réparées. On peut juger de quels efforts les François seroient capables s'il étoit question de défendre leur territoire ou l'indépendance de ma couronne (1).

« J'irai bientôt me mettre à la tête de mes armées, et confondre les promesses fallacieuses de nos ennemis. Dans aucune négociation l'intégrité de l'empire n'est et ne sera mise en question.

« Aussitôt que les soins de la guerre nous laisseront un moment de loisir, nous vous rappellerons dans cette capitale pour

(1) Personne ne doute en effet que les François n'eussent bien su, comme les Espagnols, défendre leur territoire et leur indépendance, s'ils avoient eu pour empereur Fran çois I., Henri IV ou Louis XIV, au lieu de Napoléon.

1813.

1813.

assister au couronnement de l'impératrice notre épouse bien-aimée, et du prince héréditaire roi de Rome, notre cher fils. >>

Peu de jours après cette réponse, il conféra le titre de régente à l'impératrice, et lui donna, par ce titre, le droit de présider, pendant son absence, le sénat, le conseil d'état et celui des ministres. L'impératrice n'usa qu'une fois de sa prérogative, ce fut le 7 octobre suivant ; et le résultat prouva toute la sagesse de la loi salique.

Personne ne connoissoit mieux que l'empereur l'esprit des François et la portée de celui de l'impératrice; mais, en donnant à sa femme ce témoignage éclatant de sa déférence, il avoit pensé que c'étoit un moyen de resserrer les liens de bonne amitié entre son beau - père et lui.

Tandis que ceci se passoit à Paris, les débris de la grande armée, commandés par le roi de Naples (Murat) et poursuivis par les Russes, faisoient leur retraite. à travers la grande Pologne, se battant à chaque poste, se ralliant après chaque défaite.

Le roi de Naples, trop foible pour une situation si critique, avoit assez d'esprit pour en prévoir les suites; et, songeant dès-lors à séparer sa cause de celle de

Napoléon, il remit le commandement 1813. de l'armée au vice-roi d'Italie (le prince Eugène), et, avec ce qui lui restoit de la sienne, il reprit le chemin de ses états. Le prince Eugène se montra digne du poste périlleux qu'on lui confioit. Il y déploya des talents, du sang-froid, du courage, et une activité extraordinaire. Il étoit en position sur l'Oder quand il apprit la défection du roi de Prusse. Il s'y attendoit, parce qu'il n'ignoroit pas que c'étoit comme contraint que le roi de Prusse faisoit la guerre à la Russie. Il n'en fut pas troublé. Il rassembla aussitôt tous les corps de son armée, et, résolu d'aller au-devant des renforts que l'empereur lui envoyoit, il marcha à grandes journées, mais en bon ordre, sur Berlin, où il arriva le 28 février, et qu'il évacua le 3 mars pour se rapprocher de la Saxe. Le 1er avril, il s'étoit établi et retranché sur la Saale, ayant sa gauche appuyée sur Magdebourg, son centre sur Hall, et sa droite sur Naümbourg. Dans cette longue marche, il perdit peu de monde, et le moral de son armée se retrempa. Dans sa position retranchée, il attendit l'empereur sans inquiétude.

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Napoléon partit de Paris le 15 avril, et Campagne arriva le 16 à Mayence. Il y resta huit jours, pendant lesquels il s'occupa sans

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de

relâche des travaux relatifs à la réorganisation de son armée. Il se remit en route le 24, et le 28 il rejoignit le prince Eugène à Naümbourg. Cette activité redoubloit ses forces; il étoit dans son élément.

Le même jour, les maréchaux Ney et Bessières traversèrent la Saale, manoeuvrèrent pour franchir le défilé de Poserno, où leurs avant-postes rencontrèrent ceux du général Winzingerode, et engagèrent avec eux une vive escarmouche, dans laquelle le maréchal Bessières fut tué d'un coup de canon (1).

L'armée des alliés, forte de cent quatre-vingt mille hommes, et celle des François de deux cent mille, dont plus de la moitié étoit composée de nouvelles recrues, se trouvèrent en présence dans les plaines de Lutzen, lieu déjà fameux par une bataille dans laquelle le roi de Suède Gustave-Adolphe fut tué sur ses trophées, en 1632.

Bataille Les alliés, animés par la présence de Lutzen. leurs souverains, l'empereur de Russie et

le roi de Prusse, et encore plus par le sou

(1) M. Bessières s'éleva du rang de simple soldat au grade de maréchal de l'empire. Il avoit suivi Buonaparte dans ses campagnes d'Italie, en Egypte, en Allemagne et en Russie, sans avoir jamais eu de commandement en chef. Il s'étoit toujours distingué par son courage et son sang-froid dans toutes les opérations qui lui furent confiées:

venir récent de leurs succès, attaquèrent 1813. avec impétuosité le corps d'armée que commandoit le maréchal Ney, et le culbutèrent après une longue résistance. Mais Napoléon, à la tête de la garde impériale, parut tout à coup devant eux, arrêta leurs progrès, rétablit le combat, et prit à son tour l'offensive. Les maréchaux Macdonald et Marmont le secondèrent merveilleusement en manœuvrant par la droite; les alliés, qui croyoient marcher à une victoire assurée, furent d'abord étonnés, puis découragés ; ils ne songèrent bientôt plus qu'à faire leur retraite ; ils la firent en bon ordre, et se retirèrent sur Pegau, en Misnie..

Les Francois, qui, depuis Moscou avoient perdu l'habitude et presque l'espoir de vaincre, retrouvèrent à Lutzen, avec leurs forces, leur confiance et leur discipline.

Napoléon ne perdit pas une si belle occasion de les exalter, en les glorifiant. Le lendemain de la victoire, il leur adressa cette proclamation.

« Soldats, je suis content de vous; vous avez rempli mon attente; vous avez ajouté un nouveau lustre à la gloire de vos aigles. Nous rejetterons les Tartares dans leurs affreux climats. Vous avez bien mérité de l'Europe civilisée. »

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