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DE L'ORGANISATION DU SERVICE DE SAUVETAGE

A BORD DES PAQUEBOTS A PASSAGERS EN CAS DE NAUFRAGE

COMMUNICATION

PRÉSENTÉE PAR

M. CHARLES BÉNARD

Enseigne de vaisseau de réserve de la Marine française
Administrateur des Docks maritimes de Bordeaux

Président de la Société d'Océanographie du Golfe de Gascogne
Administrateur des Pêcheries à vapeur de l'Océan

Durant ces dernières années, de très grands progrès ont été réalisés dans la construction et l'armement des paquebots et des navires de commerce; mais, il ne semble pas que l'organisation du service de sauvetage en cas de naufrage, tant pour les passagers que pour les équipages, ait été améliorée.

En général, on trouve à bord des vapeurs à passagers, un nombre assez important d'embarcations de sauvetage, des ceintures et quelques apparaux; mais, chaque Compagnie de navigation possède des embarcations dont les formes, l'armement et les procédés de mise à l'eau sont aussi différents que possible; en résumé, il n'existe pas à l'heure actuelle de méthode générale d'organisation et de préparation du service de sauvetage en cas de naufrage.

La diversité des appareils et du principe même des appareils, constitue un inconvénient grave. Il est incontestable, en effet, que si les voyageurs étaient habitués à rencontrer toujours les mêmes systèmes, ou des systèmes analogues, s'ils trouvaient sur tous les paquebots les mêmes instructions en cas de sinistres,

un grand nombre d'entre eux les connaîtraient, sauraient comment les appareils fonctionnent et pourraient en cas de naufrage coopérer aux opérations de lancement et d'embarquement; tout au moins, ils ne jetteraient pas le trouble dans les manœuvres et ne compromettraient pas de nombreuses existences par des opérations maladroites, dictées par la peur et par l'ignorance.

M. le commandant Banaré, dans le rapport présenté par lui au Congrès International de Sauvetage de l'Exposition de 1900, a démontré que les efforts les plus louables réalisés par des Compagnies de navigation comme le Norddeutscher-Lloyd, qui a placé 48 embarcations de sauvetage sur le Kaiser-Wilhelmder-Grosse, sont insuffisants, car rien n'est plus difficile que de lancer à la mer autant d'unités de sauvetage; le meilleur moyen consiste dans l'emploi de grands chalands insubmersibles, automatiques, servant en temps ordinaire de passerelles promenades. Ces radeaux peuvent porter un nombre considérable de naufragés; le flottement se fait automatiquement, et il est prouvé aujourd'hui que le tourbillon causé par le navire qui coule ne peut point les entraîner; il suffit donc que chaque personne à bord sache sur lequel des chalands elle doit se rendre pour que ces derniers, en cas de naufrage, soient aisément et rationnellement utilisés.

Dans son rapport, au même Congrès, le chevalier Pesce, ingénieur, Conseil de l'Ambassade d'Italie, a prouvé combien les efforts tentés demeuraient stériles par suite du manque d'organisation préparatoire. Sa demande de création d'un Bureau maritime permanent ou d'une Commission maritime permanente chargée d'étudier les meilleurs appareils et d'obtenir une sanction officielle internationale doit être retenue et soutenue par le Congrès de l'Association Maritime Internationale.

Il conviendrait, enfin, de faire étudier d'une façon toute particulière l'armement des embarcations ou des chalands automatiques, insubmersibles, en vue de la nourriture et de l'existence des naufragés réfugiés à leur bord. Ce n'est pas au moment où le sinistre survient qu'il faut jeter dans les canots ou sur les chalands, avec désordre, ce qui peut tomber au hasard sous la main; tout devrait être installé à bord, à l'avance, réduit naturellement au strict minimum, mais ne comprenant que des

choses indispensables: petit appareil distillateur, combustible, vivres, tentes, couvertures, médicaments, apparaux de navigations et instructions pour s'en servir.

Les vivres devraient être composés de substances très nourrissantes sous un petit volume.

Les embarcations devraient, en outre, posséder les ustensiles de pêches (filets, foënes, harpons, hameçons, amorces) et des instruments nécessaires pour s'en servir dans les conditions si remarquablement indiquées par S. A. S. le Prince de Monaco, à l'Académie des Sciences, en décembre 1888. La pêche, pratiquée rationnellement sur les embarcations, outre qu'elle approvisionnerait considérablement les rations dans toutes les mers chaudes et tempérées, serait aussi une occupation des plus utiles pour entretenir les espérances et soutenir plus longtemps le moral des malheureux perdus sur l'Océan.

En conséquence, il serait utile d'adopter le vœu suivant : Le Congrès de l'Association Internationale de la Marine émet le vœu :

1° Que les grands paquebots soient pourvus non seulement d'embarcations et de ceintures de sauvetage, mais aussi de grands flotteurs insubmersibles et automatiques;

2o Que l'embarquement des passagers et de l'équipage soit réglé d'avance et affiché dans toutes les cabines, dans toutes les parties habitées du navire, sur le pont et sur les chalands;

3° Que les chalands et les embarcations contiennent avec leurs agrès et quelques vivres, les engins de pèche préconisés par S. A. S. le Prince de Monaco, dans sa remarquable communication à l'Académie des Sciences de Paris de décembre 1888;

4° Que conformément au vou de M. le Chevalier Pesce, émis au Congrès de sauvetage, tenu à Paris, du 16 au 23 juillet 1900, il soit créé à bref délai un Bureau maritime international permanent d'étude des moyens de sauvetage;

5° Que conformément au vœu n° 8, § a, de la 3me Section du Congrès de la Marine marchande, l'Administration de la Marine des différents Etats exerce une surveillance plus efficace sur les appareils de sauvetage placés à bord des navires.

RÉSUMÉ HISTORIQUE

DES

CONGRÈS DE SAUVETAGE

COMMUNICATION

PRÉSENTÉE PAR

le Chevalier PESCE

Secrétaire général de l'Association Internationale de la Marine

I

Depuis que la navigation maritime a pris un si grand développement, le nombre des sinistres en mer va sans cesse en augmentant ainsi qu'on peut le constater en jetant un coup d'œil sur les statistiques dressées par les soins du Bureau Veritas. On y relève, en effet, que, dans ces dernières années, les désastres maritimes, c'est-à-dire les pertes complètes de navires, corps et biens, par suite d'échouements, abordages, collisions, incendies, etc., se sont élevées en 1896, à 813 voiliers et 190 vapeurs, soit 1.003 navires représentant ensemble un tonnage de 506.752 tonneaux; en 1897, à 950 voiliers et 299 vapeurs, soit 1.249 navires représentant ensemble un tonnage de 614.744 tonneaux; en 1898, à 1.154 voiliers et 362 vapeurs, soit 1.516 navires d'un tonnage global de 713.085 tonneaux; en 1899, 1.002 voiliers et 339 vapeurs, soit 1.341 navires d'un tonnage global de 657.078 tonneaux; en 1900, 1.011 voiliers et 328 vapeurs, soit 1.339 navires représentant un tonnage global de 815.332 tonneaux !

Les pertes des cinq années précédentes, c'est-à-dire de 1891 à 1896, ont été de 4.506 voiliers et 980 vapeurs, soit une

moyenne annuelle de 901 voiliers et 196 vapeurs entièrement perdus, corps et biens, et représentant un tonnage de 1 million 775.792 tonneaux pour les voiliers et 785.017 tonneaux pour les vapeurs, soit un tonnage global annuel de 512.142 ton

neaux.

Ces chiffres deviennent encore plus éloquents si l'on considère l'ensemble de tous les accidents annuels, connus, survenus dans la navigation maritime et comprenant non seulement les pertes totales, mais encore les avaries de tous genres.

En 1896, 3.482 voiliers et 3.607 vapeurs sont perdus ou

avariés.

En 1897, 3.317 voiliers et 3.424 vapeurs sont perdus ou avariés.

En 1898, 3.630 voiliers et 3.689 vapeurs sont perdus ou

avariés.

En 1899, 3.133 voiliers et 3.723 vapeurs sont perdus ou avariés.

En 1900, 2.896 voiliers et 3.305 vapeurs sont perdus ou avariés.

Pendant la période quinquennale 1891-1896, il y a eu 19.972 voiliers et 16.450 vapeurs perdus ou avariés, soit une moyenne annuelle de 3.994 voiliers et 3.290 vapeurs.

Encore faut-il faire observer que dans ces chiffres ne sont pas comptés les voiliers d'un tonnage inférieur à 50 tonneaux et les vapeurs d'un tonnage inférieur à 100 tonneaux.

II

Les causes naturelles d'accidents sont tout d'abord les tempêtes; ensuite les récifs et écueils qui émaillent les routes suivies par les navires, puis les banquises et les icebergs des mers du nord, et enfin les collisions entre navires.

Grâce aux grands progrès réalisés dans le domaine de la science et de la construction mécanique, on est arrivé à construire des navires pouvant lutter contre les mauvais temps et résister aux tempêtes.

Grâce aux études météorologiques, on est arrivé à connaître d'une manière assez précise le régime des vents et des courants

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