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l'ordonne, soit qu'on la provoque indirecte ment, serait une des fautes les plus graves; des troupes réunies se décident facilement à l'obéissance, et l'obéissance est toujours l'auxiliaire da bon ordre. La conduite et l'exemple de l'armée, qui est essentiellement citoyenne et nationale, auraient la plus grande influence sur la pacification des départemens.

Il y a aussi de l'hésitation dans une partie de l'intérieur de la France; il y a même de la résistance sur quelques points. Il faut l'attribuer à l'ignorance de ce qui se passe, à l'interruption des communications, à la marche des troupes étrangères, qu'on avait espéré de voir stationnaires quand la guerre est terminée, et aux inquiétudes qu'on a sur l'avenir : les négociations de la paix ne sont point encore commencées, le peuple ne connaît aucune des intentions des puissances.

La vérité est, cependant, que la France n'aspire qu'à resserrer son union avec le monarque. Les souverains désirent sans doute que la France soit calme ét tranquille sur toutes les parties de son territoire, il est en leur pouvoir d'obtenir dans l'instant même ce résultat, on n'a qu'à annoncer que, sauf l'issue des négociations, ils regardent eux-mêmes la guerre comme finie, et la France comme pacifiée. Cette négociation ne fût-elle

pas

dans les règles ordinaires de la politique, notre situation et l'intérêt même des puissances exigeraient cette exception. La pacification ne préjuge rien, elle ne fait cesser que des maux. Les restes de nos troubles ne peuvent plus s'appeler de la résistance; tout le monde veut obéir au Roi, on ne veut plus séparer les intérêts du peuple de ceux du trône: chacun est même convaincu que le Roi, pour affermir à jamais son pouvoir, ne trouvera autour de lui aucun obstacle qui l'empêche de donner à la liberté civile et politique des garanties suffisantes.

Les proclamations du Roi rétabliraient sans doute l'ordre public; mais en parlant à son peuple, le Roi ne pourrait se dispenser de faire entrevoir, du moins en partie, les destinées de la France. En attendant, le peuple ne veut et ne peut juger de l'avenir que par les promesses des souverains, et il n'y eut jamais de promesses plus solennelles. La France a rempli, aussitôt que cela a été possible, les seules conditions qui lui étaient demandées et qui devaient écarter la guerre ou la faire cesser; elle a même regardé comme une condition formelle ce qui n'était qu'un désir et un vou des souverains.

Aucun des dangers que l'on pouvait craindre à l'époque de la paix de Paris n'existe plus. On avait laissé à Bonaparte un territoire, un titre

et un état de souverain; son abdication n'était qu'un traité avec les puissances. Il a été maintenant abandonné par la fortune, il n'a plus ni peuple, ni armée, ni protection; la prudence exige cependant que sa position ne lui laisse plus aucun moyen de troubler le repos des

autres.

Ses frères n'ont jamais eu en France aucun crédit; ils n'ont pas les grandes qualités qui donnent de l'influence; toutefois il convient de les éloigner de la France. Sans être d'aucun danger personnel, de fausses espérances pourraient survenir et les engager à servir d'instrumens à d'autres. Le chef de cette famille survivra peut-être à son abdication; il a d'ailleurs un fils, et s'il a manqué quelque développement aux déclarations des puissances, il pourrait paraître nécessaire de les rendre maintenant plus explicites. Au reste, il ne serait ni dans nos mœurs ni dans les principes de la justice, d'empêcher les membres de la famille de Bonaparte de vendre leurs biens en France et d'en jouir dans les pays étrangers. Leurs biens sont même peu importans.

Le même esprit de prévoyance pourrait s'appliquer peut-être à quelques autres individus, mais en bien petit nombre; car sur ce point il y a bien plus de danger à étendre les applications.

qu'à les restreindre. Il ne faut jamais voir dans Jes troubles publics que la première cause qui les a produits tout cesse avec cetle cause; et l'on a toujours vu que les recherches contre une faction ne servent qu'à faire naître d'autres factions. La situation d'Henri IV, quand il entra dans Paris, était moins fâcheuse que celle du Roi, puisqu'il monta sur le trône sans le secours de troupes étrangères et par ses propres victoires. Sa clémence, cependant, fut sans bornes c'est à ses ennemis qu'il prodigua ses faveurs, ne croyant pas avoir besoin de recourir à ce moyen pour retenir ses partisans; ses bontés pour le duc de Mayenne laissaient douter s'il ne l'avait pas toujours eu à ses côtés pour compagnon de ses combats. Mademoiselle de Guise avait engagé ses diamans pour mettre à prix la tête de son roi : cette circonstance ne fut pour Henri IV qu'une raison de plus de lui accorder la distinction la plus marquée. Ce prince savait bien que la paix ne s'établit qu'en faisant cesser toutes les inquiétudes; qu'on ne pourrait frapper une seule tête qui n'est plus d'aucun danger, sans menacer des milliers de citoyens, et sans s'exposer par cela même, plutôt ou plus 1ard, à de nouveaux bouleversemens. Les germes de haîne que l'on jette dans les cœurs au commencement d'un nouveau règne, n'y meurent jamais..

On aurait beau multiplier les recherches, on se convaincrait que personne n'a eu connaissance d'aucune conspiration qui ait précédé l'arrivée de Bonaparte sur les côtes de Provence; et avant d'attaquer qui que ce soit à ce sujet, ne faudrait-il pas accuser d'abord les ministres du Roi qui n'ont su ni deviner, ni prévenir le départ de l'île d'Elbe? Après que le débarquement a été effectué, tout ce qui s'est passé n'a été que le déplorable résultat de l'entraînement et de la précipitation. On sent fort bien que ce n'est pas une poignée de soldats qui protégeait Bonaparte dans la ville de Lyon, au milieu d'une population de cent mille âmes. Quelques individus, à cette époque, ont peut-être un peu plus marqué que les autres; mais celui-ci dirait qu'il a été entraîné par ses officiers et ses soldats; un autre répondrait que ses troupes l'ont abandonné, qu qu'elles l'ont emporté dans leur mouvement, et pour un principal coupable que l'on chercherait à convaincre, ou l'on ne découvrirait que des innocens, ou bien l'on trouverait des milliers de complices. On ne peut se dissimuler combien de pareilles poursuites paraîtraient encore plus odieuses au milieu des malheurs publics. On opposerait à ces inutiles vengeances l'éclatant contraste de la magnanimité si connue des souverains. On voudrait en vain faire croire que

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