Sidebilder
PDF
ePub

3. Jurisprudence criminelle. Décret. -« Les peines qui seront « prononcées contre les accusés trouvés coupables par le jury, sont : « la peine de mort, la chaîne, la réclusion dans la maison de force, « la gêne, la détention, la déportation, la dégradation civique, le « carcan. — La peine de mort consistera dans la simple privation de ■ la vie, sans qu'il puisse jamais être exécuté aucune torture envers « les condamnés (V. 15 février 1788). La marque est abolie. « Tout condamné à mort aura la tête tranchée. » ( Une machine appelée guillotine, du nom de son inventeur, le docteur en médecine Guillotin, constituant, sera le seul instrument de décollation. )

5. Décret qui retire au Roi le droit de faire grace. — En le privant de cette prérogative, on tranche le dernier lien du gouvernement monarchique. Aucun sentiment n'attachera plus le peuple au prince, et la dégradation morale du trône est consommée. Ce privilége sublime, dont l'abus est idéal dans une constitution libre qui rend les agents de la couronne responsables, et qui, par l'esprit qu'elle répand, restreint nécessairement l'usage de la clémence, ne fut jamais contesté au souverain dans les monarchies absolues, ni refusé au chef du gouvernement dans les états étroitement limités. Le Roi de Pologne en jouissait; et les Américains-Unis en ont investi le président de leur congrès, avec les réserves que peut exiger l'intérêt public.

10. Le Roi proteste, mais en secret, contre la sanction qu'il a donnée le 2, à plusieurs décrets; il proteste en outre contre toutes les sanctions qui, par le passé ou à l'avenir, avaient été ou seraient obtenues contre son gré.

11. Décret ordonnant à tous les officiers des armées de terre et de mer de signer une déclaration d'obéissance et de fidélité à la constitution.

Décret enjoignant au prince de Condé de rentrer en France, sous peine d'être mis hors de la loi, et d'avoir ses propriétés confisquées.

Décret prescrivant des mesures contre les embaucheurs à l'étranger.

19. Robespierre est élu accusateur public du tribunal criminel de Paris. Péthion, Buzot en sont élus président, vice-président.

21-25. VOYAge de Varennes. Louis XVI est retenu depuis plusieurs mois aux Tuileries, sous une surveillance dont la Fayette augmente chaque jour les précautions. Il importe peu de démêler si ce commandant de la garde nationale les juge indispensables, afin

que la constitution, qu'il regarderait comme l'arche du salut public, puisse être établie, ou s'il est, à son insu, l'instrument de la faction républicaine, qui voudrait lasser l'inertie du Roi, et le pousser à des démarches dont elle dénaturerait les motifs aux yeux de la nation. Quoi qu'il en soit, Louis XVI, fatigué de sa captivité, en butte aux insultes populaires, aux motions de plus en plus outrageantes des clubs, s'émeut enfin. Il se dérobe des Tuileries avec la Reine, ses deux enfants et sa sœur, le 21, à une heure de la nuit (Cette nuit est précisément la plus courte de l'année). Le succès de l'évasion dépend, jusqu'à un certain point, du peu d'éclat mis dans les détails, et ne peut qu'être compromis par l'appareil du voyage. Un monarque fugitif ne devrait conserver aucune apparence qui le décèlè. Mais les ordonnateurs du voyage croiraient avilir la majesté royale, s'ils l'assimilaient à une condition commune, en la privant de toutes ses marques, et s'il ne trouvait pas, dans sa fuite accélérée, à-peu-près toutes les convenances dont le successeur de Louis XIV et de Louis XV est habitué de jouir dans un voyage d'agrément. Il serait difficile d'imaginer quelque chose de plus mal combiné que le plan et l'exécution de ce voyage.

A la vue d'un très-grand équipage, de forme extraordinaire, suivi d'une autre voiture, l'attention est d'autant plus éveillée, dans chaque lieu de passage, que de sinistres rumeurs sont répandues sur la route de Lorraine, l'une des routes les plus suivies par les émigrants. Le projet de la fuite du Roi était annoncée depuis plusieurs jours, par quelques journaux de Paris, tenant à la faction démocratique; soit qu'ils tinssent ces discours d'après des notions vagues du secret du Roi, ou que ce fût une de ces choses qu'ils inventaient tous les jours au hasard, et qui s'est trouvée fortuitement vérifiée par l'évènement. Neuf voyageurs, deux courriers, l'un en avant, l'autre à côté de la principale voiture, employant onze chevaux, ne sauraient passer, sans se faire remarquer, à travers des gardes nationales qui sont dans la première ferveur de leur service, en présence d'autorités soupçonneuses et jalouses, à l'excès, de faire valoir leurs nouvelles attributions.

Ayant éludé tous les obstacles que présentait la sortie de Paris, Louis XVI s'avance sur la route dans une douce sécurité, par conséquent avec négligence; se mettant assez souvent à la portière; descendant quelquefois aux relais ; agréablement surpris de se trouver dans l'état ordinaire de la vie sociale. Il s'arrête à Étoges (Marne), chez une personne de confiance, pour des réparations à sa voiture; il y reste

deux heures, quoique ayant le moyen d'en prendre une autre et de continuer aussitôt sa marche. Il traverse Châlons à quatre heures et demie; il y est reconnu par plusieurs personnes. A la poste suivante (pont de Sommevelle, trois lieues de Châlons), on devait trouver des troupes à cheval pour entourer la voiture jusqu'au relais suivant; personne n'y étant, on y reste dans l'attente jusqu'à huit heures. On arrive à Sainte-Ménehould où le Roi s'étant montré plusieurs fois est reconnu par le maître de poste Drouet, pendant qu'on achève d'atteler: cet homme n'ose pas l'arrêter; mais il dépêche son fils par des chemins de traverse, afin de prévenir les autorités des lieux sur lesquels on se dirige. Celui-ci devance la voiture à Varennes (quarante-huit lieues de Paris), où elle parvient à onze heures du soir seulement. Louis XVI y est arrêté; et ce qui doit paraître inconcevable, il défend les tentatives qui pourraient le dégager. Des dragons, détachés pour l'escorter jusqu'à Montmédi, but de son voyage, sont désarmés par les habitants en essayant de le délivrer. Loin de se montrer alarmée à la nouvelle du départ de la famille royale, l'assemblée nationale prend avec calme des mesures décisives. En quelques heures, elle se voit investie de tous les pouvoirs ; et cela, sans troubles, sans orages, sans même agitation à la surface. Le gouvernement marche, les affaires s'expédient à l'ordinaire, les spectacles s'ouvrent et les pièces sont écoutées; rien n'est dérangé des habitudes journalières de cette nombreuse population que renferme Paris, durant les trois jours écoulés dans l'incertitude de ce qu'est devenu le chef du gouvernement : l'indifférence, à-peu-près générale sur le sort des augustes fugitifs, indique aux ambitieux que les images d'une ancienne adoration ne reposent plus que sur des cœurs attiédis.

L'assemblée envoie au-devant du Roi les députés Barnave, La Tour-Maubourg, Péthion. Ce cortége entre à Paris, le 25, à sept heures du soir, au milieu d'une foule immense, frappée de stupeur. Trois gardes-du-corps, enchaînés, sont placés sur le siége de la voiture du Roi. La populace, irritée de ce qu'ils ne méconnurent pas leur devoir, se dispose à les massacrer; la garde nationale parvient à les sauver. A l'exception de ce mouvement éphémère de férocité, la contenance du peuple est morne et silencieuse; il regarde passer le cortége sans montrer aucune irritation, ni la plus légère émotion de pitié. Louis n'essuie point d'insulte personnelle. Nul cri menaçant, nulle sorte d'injure qui s'adresse à lui-même, ne vient frapper son oreille et le retirer de son affliction par le sentiment d'un danger

"

imminent. Tous les hommes restent la tête couverte. On lit sur des placards: Quiconque applaudira le Roi, aura des coups de bâton ; quiconque l'insultera, sera pendu.

En partant de Paris, le Roi a laissé une proclamation qui est rendue publique dans la journée. Il y retrace les mauvais traitements qu'il ne cesse d'éprouver depuis le 6 octobre 1789, qu'il habite les Tuileries. « Lorsque le Roi a pu espérer de voir renaître « l'ordre et le bonheur par les moyens employés par l'assemblée << nationale et par sa résidence auprès de cette assemblée, aucun « sacrifice ne lui a coûté; il n'aurait par même argué du défaut de « liberté dont il est privé depuis le 6 octobre 1789 mais aujourd'hui que le résultat de toutes les opérations est de voir la royaute « détruite, les propriétés violées, la sûreté des personnes compromise, une anarchie complète dans toutes les parties de l'empire, « sans aucune apparence d'autorité suffisante pour l'arrêter; le Roi, après avoir protesté contre les actes émanés de lui pendant sa captivité, croit devoir mettre sous les yeux des Français le tableau de « sa conduite...... Français, et vous qu'il appelait habitants de sa « bonne ville de Paris, méfiez-vous de la suggestion des factieux; << revenez à votre Roi; il sera toujours votre ami, quand votre sainte religion sera respectée, quand le gouvernement sera assis sur un pied stable et la liberté posée sur des bases inébranlables. »

[ocr errors]

«

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Tel est le sombre dénouement d'une entreprise résolue si tardivement, si pauvrement disposée à Paris, si misérablement exécutée, et dont le succès eût peut-être prévenu les grandes calamités qui ravageront la France. Car le jacobinisme a déjà fait de trop grands progrès pour que sa domination puisse être arrêtée par les faibles

barrières de la constitution.

L'évasion de Monsieur (Louis XVIII) s'est effectuée dans la même nuit du 21. Ce prince n'a voulu se séparer du Roi son frère, qu'au moment où sa présence ne peut plus le consoler dans ses malheurs, ni appuyer ses efforts contre les factions.

25

- 27. Décrets. Les gardes-du-corps sont licenciés. Aussitôt que le Roi sera arrivé au château des Tuileries, il lui sera provisoirement donné une garde qui, sous les ordres du commandantgénéral de la garde nationale parisienne, veillera à sa sûreté et répondra de sa personne. Il sera provisoirement donné une garde particulière à la Reine. Il sera informé sur l'évènement du 21 juin. L'assemblée nationale nommera trois commissaires pris dans son sein, pour recevoir les déclarations du Roi et de la Reine. La

sanction, l'acceptation du Roi, et toutes ses fonctions législatives ou exécutives sont suspendues. Les ministres sont autorisés provisoirement à continuer de faire, chacun dans leur département et sous leur responsabilité, les fonctions du pouvoir exécutif. - Les députés Robespierre, Péthion, Alexandre de Lameth, Thouret, Roederer, se font remarquer parmi les ennemis du pouvoir royal. Ce dernier assure que les dispositions de cette loi n'attaquent pas le principe de l'inviolabilité du Roi; qu'il ne s'agit pas d'un jugement, mais seulement de le tenir en état d'arrestation provisoire.

La déclaration écrite du Roi, remise aux commissaires, porte: « ..... Les motifs de mon départ sont les outrages et les menaces qui ont été faites, le 18 avril, à ma famille et à moi-même. Depuis • ce temps, plusieurs écrits ont cherché à provoquer des violences ⚫ contre ma personne et ma famille; et ces insultes sont restées « jusqu'à présent impunies. J'ai cru dès-lors, qu'il n'y avait pas de « sûreté ni même de décence pour ma famille et pour moi de rester « à Paris. J'ai desiré, en conséquence, quitter cette ville. Ne le pou« vant faire publiquement, j'ai résolu de sortir de nuit et sans suite. . Jamais mon intention n'a été de sortir du royaume. Je n'ai eu ⚫ aucun concert sur cet objet, ni avec les puissances étrangères, ni « avec mes parents, ni avec aucun autre Français sorti du royaume. « Je pourrais donner pour preuve de mon intention, que des loge⚫ments étaient préparés à Montmédi, pour me recevoir ainsi que ■ ma famille. J'avais choisi cette place, parce que, étant fortifiée, ⚫ ma famille y aurait été en sûreté, et qu'étant près des frontières, • j'aurais été plus à portée de m'opposer à toute espèce d'invasion.... • Si j'avais eu l'intention de sortir du royaume, je n'aurais pas publié « mon mémoire le jour même de mon départ; mais j'aurais attendu d'être hors des frontières.....»

.

26. Le marquis de Bouillé, lieutenant-général, écrit de Luxembourg à l'assemblée nationale, qu'il est le seul auteur du projet d'enlever le Roi. Ses bravades, aussi fougueuses qu'impuissantes, irritent les ennemis du trône et les excitent à des mesures violentes. Juillet 3. Décret qui ordonne de grandes dispositions militaires dans les départements frontières du N. E, le complètement des régiments de l'armée de ligne, et la mise en activité de vingt-six mille gardes nationales sur la ligne exposée.

6. Lettre de l'empereur Léopold II, datée de Padoue (V. 18 mai). Les souverains sont invités à s'unir à lui, pour déclarer à la France : qu'ils regardent tous la cause du Roi très-chrétien, comme

« ForrigeFortsett »