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Dans cet état de choses, son armée fut battue par les révoltés

d'Ecosse; il fallut traiter avec eux, et assembler un nouveau parlement.

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Ici l'histoire de Charles Ier cesse de nous offrir des documens utiles, à nous, qui ne cherchons qu'à recueillir les élémens du droit politique. Dans ce temps de troubles, tous les droits furent confondus, et la constitution fut dénaturée.

Le long Parlement, ainsi nommé à cause de sa durée, commença par établir en principe que les droits de tonnage et de poundage ne pourraient être levés qu'avec son consentement. Ensuite il fit passer un bill portant que le parlement serait convoqué au moins tous les trois ans, et qu'une fois assemblé, il ne pourrait être ajourné, prorogé ni dissous pendant l'espace de cinquante jours. L'année suivante, il fit trancher la tête au comte Strafford, ministre et ami du roi : enfin un nouveau bill déclara que le parlement ne pourrait être ni cassé, ni ajourné, ni prorogé. Le roi ne put défendre ni son autorité, ni la vie de son ami.

- Peu de temps après, la guerre civile éclata entre les royalistes et les parlementaires (1): personne n'ignore qu'après des succès divers, le roi fut vaincu et fait prisonnier. Alors les deux partis qui s'étaient formés dans le parlement, ayant atteint le but vers lequel ils tendaient également, manifestèrent des vues ultérieures différentes; les uns, les presbytériens, voulaient traiter avec le roi; les autres, les indépendans, secondés par l'armée, ou plutôt agissant d'après les instigations et la volonté des généraux, et surtout de Cromwel, manifestaient les desseins les plus sanguinaires. Ces derniers expulsèrent violemment de la chambre des communes les membres presbytériens, ils déclarèrent que tout ce qui était constitué et notifié loi par les communes prenait force de loi sans le consentement du roi ou de la chambre des pairs. Les obstacles étant ainsi écartés, la chambre des communes pur

(1) Ces deux partis étaient aussi désignés par les noms de cavaliers et de têtes rondes: c'est là l'origine des Torys et des Whigs.

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gée (1) de tous les membres opposans, rendit l'ordonnance pour le procès de Charles Stuart, roi d'Angleterre, et le 30 janvier 1649, la tête du monarque tomba sous la hache du bourreau.

L'Angleterre fut constituée en république; et tandis que le mot de liberté était dans tous les actes et dans toutes les bouches, tout était soumis à la puissance de Cromwel.

En 1655, il fut déclaré protecteur. Il n'entre point dans notre plan de retracer les événemens de sa vie, ni ceux qui rappelèrent la famille des Stuarts sur le trône d'Angleterre; et sans doute nous ne devrions pas nous attacher à faire connaître la nouvelle constitution du protectorat, nommé l'instrument d'Etat, puisque Cromwel en empêcha toujours l'exécution, tantôt par la violence et tantôt par la ruse; toutefois voici quelles en étaient les principales dispositions. Il y avait un conseil composé de vingt-un membres au plus et de treize au moins. Ces membres étaient nommés à vie; en cas de vacance, le conseil nommait trois candidats, entre lesquels le protecteur devait choisir. Le protecteur était le magistrat suprême de la république, la justice était administrée en son nom, il nommait à tous les emplois : en lui résidait le droit de paix et de guerre et celui de grâce; toutefois il ne pouvait exercer ces droits qu'avec le consentement du conseil. Le commandement et l'administration de l'armée lui étaient déférés. Le protecteur devait convoquer un parlement de trois ans en trois ans : une fois assemblé le parlement ne pouvait être dissous, ni prorogé, ni ajourné pendant cinq mois. Les bills devaient recevoir l'approbation du protecteur; toutefois si son consentement n'était pas donné dans les vingt jours, ils devenaient lois par la seule autorité du parlement. L'armée permanente ne pouvait être diminuée sans le consentement du protecteur; des fonds étaient assignés pour son entretien

(1) Cette expression est consacrée ; on appela la purgation du colonel Pride, la mesure violente par laquelle cet officier arrêta quarante-un membres du parti presbytérien,

(on comprend toute l'importance de cette disposition). Dans l'intervalle des sessions, le protecteur et le conseil d'Etat pouvaient faire des lois qui avaient autorité jusqu'à la convocation du parlement. Le chancelier, le grand-trésorier, l'amiral, les gouverneurs d'Irlande et d'Écosse et les chefs de justice des deux cours étaient nommés par le protecteur, avec l'approbation du parlement, et dans les intervalles, avec celle du conseil, sauf la confirmation ultérieure du parlement. Le protecteur était nommé à vie. A sa mort, le conseil devait le remplacer.

A la mort de Cromwel, son fils Richard lui succéda; mais il n'avait aucune des qualités nécessaires pour conserver le pouvoir suprême. Il abdiqua presque volontairement l'autorité. Le long parlenient (1) fut rappelé, puis expulsé: enfin, après de nouveaux troubles qui durèrent un an, la famille de Stuart remonta sur le trône d'Angleterre, dans la personne de Charles II.

Les commencemens de ce règne furent aussi heureux qu'on devait l'attendre des sentimens qui animaient le roi et la nation. Une amnistie générale fut publiée, les juges de Charles I et quelques chefs du parti républicain en furent seuls exceptés, et certains d'entre eux furent punis de mort. Le roi consentit à l'abolition des droits de garde noble et de pourvoirie: le parlement, de son côté, accorda des subsides et les droits de tonnage et de poundage pour toute la durée* du règne. Les évêques furent non seulement rétablis dans leurs droits spirituels, mais ils reprirent encore leur rang dans la chambre des pairs, dont ils avaient été exclus un peu avant le commencement des guerres civiles. Dans une autre session, il fut établi d'un commun accord que l'interruption des assemblées du parlement ne durerait au plus que trois ans. Cette union ne dura pas long-temps. Pour se faire une juste

(1) Il fut nommé le Rump ( croupion), par les presbytériens et les royalistes alors réunis. Ce nom lui fut donné, dit Hume, par allusion à cette partie de l'animal qui passe pour la plus vile.

idée des causes qui mirent la division entre le monarque et les sujets, il faut se rappeler l'effervescence et l'animosité qui régnaient alors en Angleterre entre les différentes sectes, et les différens partis royalistes, républicains, anglicans, presbytériens, catholiques, indépendans. Le roi professait la tolérance à l'égard des non conformistes ; il était soupçonné de protéger en secret les catholiques; à l'extérieur, il entreprit des guerres et fit des alliances également contraires à l'opinion publique et à l'intérêt national, et dès-lors le parlement commença à se montrer moins docile. Peu-à-peu on vit le roi, ou plutôt ses ministres, développer le plan qu'ils avaient conçu pour s'arroger le pouvoir absolu. L'acte le plus remarquable, par lequel se manifesta ce système d'empiétement, fut l'Edit d'indulgence, publié en 1672, et par lequel le roi s'arrogeant le pouvoir suprême, en matière de religion, suspendit toutes les lois pénales contre les protestans non conformistes et contre les catholiques, accorda aux premiers l'exercice public de leur religion, et aux autres l'exercice particulier dans l'enceinte de leurs maisons. D'ailleurs la crainte, et par conséquent la haine du papisme, augmenta lorsqu'on vit le duc d'Yorck, frère du roi, se déclarer ouvertement catho→ lique. En cet état de choses, le ministère et le roi voyaient bien ce qu'ils avaient à craindre du parlement; mais le besoin des subsides força de le convoquer. Le premier objet dont il s'occupa fut l'édit d'indulgence: on l'attaquait, comme contraire, dans ses dispositions, aux lois et actes du parlement, et comme illégal et arbitraire, en ce qu'il émanait du roi seul.

D'abord la cour parut vouloir soutenir l'édit sous l'un et l'autre rapport; mais bientôt on reconnut que la résistance serait inutile, on céda.

L'édit d'indulgence fut donc révoqué, et un bill imposa un test, c'est-à-dire, une épreuve à tous ceux qui étaient appelés à des fonctions publiques. Cet acte exigeait, outre les sermens d'allégeance et de suprématie, et la réception du sacrement dans une église anglicane, un serment ainsi conçu :

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« Je déclare que je crois qu'il ne se fait point de transubs»tantiation dans le sacrement de la Cène du Seigneur, ni avant » ni après la consécration faite par quelque personne que ce puisse être.

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Depuis cette époque, le roi perdit de jour en jour la confiance et l'autorité qu'il avait acquises; abandonné ou plutôt trahi par ceux qui lui avaient suggéré des idées d'envahissement sur les droits du peuple, il fut obligé d'accéder aux justes réclamations du parlement, et ne repoussa qu'avec peine les prétentions les plus exagérées et les plus illégales; tel fut par exemple, le bill proposé par les communes pour exclure le duc d'York de la couronne. Toutefois cette lutte entre le monarque et le parlement eut un heureux résultat: elle fit consacrer la liberté civile par l'acte connu sous le titre d'habeas corpus. Nous nous bornons à en présenter ici l'analyse, puisqu'il se trouve rapporté en entier dans le texte des lois constitutionnelles. C'est beaucoup sans doute que les droits des peuples soient reconnus dans les lois fondamentales des Etats; mais ces déclarations de principes deviennent illusoires, si elles ne sont soutenues par des institutions fortes et durables. La grande charte avait dit que nul ne pourrait être emprisonné arbitrairement; l'acte d'habeas corpus vint déterminer les moyens légaux d'obtenir la réparation d'un emprisonnement illégal : il désigna les juges à qui la demande d'élargissement devait être adressée, surtout il prononça des amendes au profit de la partie lésée, contre tous auteurs, complices ou exécuteurs d'une arrestation arbitraire. Ce fut vraiment alors que la liberté individuelle fut solidement garantie contre les excès de pouvoir.

L'idée que nous avons donnée de l'état du royaume sous Charles II, et des opinions dominantes, suffit sans doute pour faire prévoir la catastrophe qui termina le règne de Jacques II,

son successeur.

Ce prince, comme on l'a dit, était catholique déclaré, et ses actes montrèrent bientôt qu'il n'était pas moins attaché

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