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cain. Et la nation, toujours séduite à l'appât de la nouveauté, malgré de cruels sacrifices, inhabile à pressentir la tendance de cette révolution, comme à discerner l'ambition de l'homme qui l'exécute, la nation s'abandonne au torrent, dans l'espoir d'être enfin déposée sur un rivage affermi.

QUATRIÈME Période.

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1799.

Gouvernement consulaire.

«Dans une république où un citoyen se fait donner un pouvoir exorbitant, l'abus de ce pouvoir est plus grand. »

(MONTESQUIEU.)

Toujours la tyrannie a d'heureuses prémices.

(RACINE.)

NOVEMBRE

BRE 13. Révocation de la loi du 12 juillet, relative aux ôtages. 13. Reddition d'Ancône. — Le général Monnier, qui soutient avec une rare intrépidité, depuis six mois, un siége pour lequel sont réunies des forces autrichiennes, napolitaines, russes, turques, et des bandes d'insurgés, conclut une capitulation très-honorable. La garnison rentre en France sur parole.

16. Arrété des consuls provisoires ordonnant la déportation ou la mise en accusation de 60 individus. Le général Jourdan et Santhonax, ex-députés, sont les seuls remarquables; les autres sont d'obscurs factieux.

21. Bourse de Paris. — Le tiers-consolidé, appelé plus tard les cinq pour cent, coté, le 8, à 11 f. 3oc., monte à 22 f. - Il s'élevera, le 10 mars 1810, à 83 f. go c. — Il sera coté, le 29 mars 1814, à 45 f. Le 5 mars 1815, à 88 f.

22. Le citoyen Talleyrand-Périgord rentre au ministère des relations extérieures, qu'il a quitté il y a cinq mois (V. 16 et 18 juin). Il se trouve mis, de la sorte, en regard du citoyen Fouché dit de Nantes, qui tient dans sa main les mystérieux ressorts de la police de l'intérieur. Ainsi ces quadrupèdes subtils et avisés, dont la nature amincit les proportions, à qui elle donna l'instinct et les facultés de se glisser dans les cavités accidentelles d'un édifice en destruction, ressortent toujours sains et saufs de ses décombres amoncelés, et reparaissent au grand jour. L'un et l'autre ministre servira très-efficacement le despotisme naissant de Bonaparte; le premier, en flattant les royalistes de retrouver les institutions monarchiques et les faveurs d'une cour splendide, s'ils renoncent de bonne grace à l'ancienne dynastie; le second, en amenant les jacobins aux pieds du destructeur de l'égalité. Les uns convoitent le retour des abus, les autres

demandent leur stabilité dans les places dont ils se trouvent en possession.

Novembre 24. Réunion des armées du Rhin et du Danube, sous le nom d'armée du Rhin; Moreau en prend le commandement. Massena passe à celui de l'armée d'Italie.

Décembre 2, 3. Combat de Philipsbourg (cercle du haut Rhin). - L'autrichien Sztarray bat les Français et dégage cette place.

5. Reddition de Coni, après un siége de dix-sept jours; elle est la suite de la défaite de Savigliano ( V. 4 novembre). Cette clef du Piémont l'ouvre entièrement aux Autrichiens.

8. Evacuation de Manheim et de la rive droite du Rhin. 9. Mort de George Washington, âgé de 68 ans; et depuis trois ans, rentré dans la vie privée. Cet illustre Américain commença la révolution de son pays, par l'énergie; il l'acheva par la modération; il sut la consolider, en la dirigeant constamment vers la plus grande prospérité de ses concitoyens. Il ne porta jamais atteinte à la propriété. Son ouvrage, fondé sur la morale et le goût du travail, s'élevait à peine, que les nations l'admirèrent. Voici les dernières paroles qu'en septembre 1796, il adressait aux Américains : « J'ai toujours eu pour motif prépondérant de tâcher de gagner du << temps pour mon pays, afin qu'il pût consolider et laisser mûrir « ses institutions encore récentes, et faire sans interruption des progrès vers ce degré de force et de consistance qui lui est nécessaire « pour lui donner, humainement parlant, la disposition de son • propre sort.... Mes concitoyens éprouvent la bénigne influence << de sages lois, sous un gouvernement libre. >>

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La gloire de Washington, le seul homme auquel l'histoire moderne ne puisse en comparer un autre, serait sans tache, si ce n'était l'odieux évènement de la mort de Jumonville, jeune officier envoyé vers lui, en parlementaire, par le commandant des établissements français sur l'Ohio. Washington, alors (24 mai 1754) major dans les troupes du roi d'Angleterre, commandait le poste qui assassina Jumonville; il était âgé de 23 ans. Loin d'offrir quelque réparation, attaqué lui-même, par le frère de Jumonville et fait prisonnier avec sa troupe, il reçut la vie et la liberté, à condition de renvoyer les Français échappés au massacre; cependant il viola sa promesse. Des Français ne sauraient effacer le souvenir de cette déplorable circonstance, quelque vénération qu'ait mérité la vie politique de ce grand citoyen.

15. Combat de Montefaccio (2 1. E. de Gênes). Le général

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Gouvion-St.-Cyr, commandant l'aile droite de l'armée d'Italie, chargé, depuis la défaite de Savigliano (V. 4 novembre), de la défense du territoire ligurien, s'y voit environné de dangers. L'anarchie est dans le gouvernement; il le renverse. La population est réduite à l'extrême misère; il sait contenir ses excès. Les soldats français exténués par les privations, se révoltent; il les fait rentrer dans le devoir, en leur apparaissant et les haranguant à la manière des grands hommes de l'antiquité. Pressé par les Autrichiens, il profite du repentir des troupes et les lance sur le général Klenau qui, malgré l'avantage d'une position presque inexpugnable, malgré sa supériorité numérique et la protection d'une escadre anglo-russe, se fait battre, perd 3,000 hommes, abandonne 4 canons. Gênes reste au pouvoir des Français.

Décembre 24. Proclamation de la constitution dite de l'an VIII. Voici la quatrième refonte de l'ordre social, depuis dix années. — Le projet de cette constitution ayant été envoyé, le 13, à l'acceptation dans les départements, on n'a pas eu le temps d'y recueillir tous les votes. On annonce, néanmoins, qu'elle a été généralement adoptée; et, sans doute, l'espoir qu'elle servira d'abri contre la tyrannie populaire, a dû réunir l'immense majorité des suffrages.

Les lois sont proposées par le gouvernement; un tribunat les discute; un corps législatif d'une seule chambre les admet ou les rejette; un sénat veille à leur conservation.-Le sénat est permanent; il se compose de membres élus à vie. Après la première formation de ce corps, les consuls présenteront trois candidats pour chaque nomination, aux sénateurs eux-mêmes. — Le gouvernement est confié à trois consuls, nommés pour dix ans, indéfiniment rééligibles. Le tribunat se compose de cent membres, âgés de 25 ans, renouvelés par cinquième tous les ans, indéfiniment rééligibles, c'est-à-dire susceptibles d'être préférés par le sénat sur des listes déja réduites de notabilité. Le corps législatif est de trois cents membres portés, comme les candidats au tribunat, sur des listes réduites de notabilité dans lesquelles le sénat doit prendre. Les représentants doivent être âgés de 30 ans; ils sont indéfiniment réadmissibles et renouvelés ainsi que les tribuns, par cinquième chaque année. Ils font la loi en statuant par scrutin secret, et sans aucune discussion de leur part, sur les projets de loi qui sont débattus, en leur présence, par les orateurs du tribunat et du gouvernement. La session ordinaire du corps législatif est annuelle et dure quatre mois. (V. pour les modifications de la

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constitution, aux 6 mai, 4 août 1802, 30 avril, 3 mai, 18 mai, 1er décembre 1804, 19 août 1807).

Napoléon Bonaparte est nommé premier consul. On lui adjoint, 1o Cambacérés ex conventionnel ayant voté la mort de Louis XVI, membre du comité de sûreté générale avec Robespierre, et législateurpratique de mesures révolutionnaires. (V. le troisième appel nominal fait deux fois, le 17 et le 18 janvier 1793, 20 janvier d°, 10, 19, 25 mars do, 23 décembre 1794); 2° Lebrun, ex-constituant, ex-député au conseil des anciens, nourri des maximes du despotisme ministériel de l'ancien régime, auprès du chancelier Maupeou, dont il a, dans sa tendre jeunesse, été le secrétaire intime.

C'est appuyé sur ces deux champions qui servirent sous deux bannières opposées, que Bonaparte s'avance au pouvoir suprême. Par eux, il opposera les royalistes aux jacobins, et les faisant fléchir également, il dominera seul sur la France. C'est d'après ce systême qu'il a déja choisi ses deux principaux ministres. (V. 22 novembre).

Sieyes et Roger Ducos, consuls provisoires, sont donc obligés de se retirer. Sièyes, ce ténébreux métaphysicien qui passait pour profond politique, honteux d'être la dupe d'un fourbe plus fourbe que lui, rentre pour toujours dans l'obscurité, qui ne saurait être affaiblie désormais que par la mémoire de sa conduite inconsidérée et factieuse aux états généraux, criminelle à la convention.

La constitution de l'an VIII, rédigée pour la circonstance ainsi que pour l'avantage exclusif de l'arbitre de la circonstance, offre néanmoins un perfectionnement dans l'esquisse des institutions propres à la France. La convention avait compris, quelque jalouse qu'elle fût d'exercer le pouvoir exécutif dans sa plénitude, qu'il devenait impossible qu'elle délibérât sur tous les actes d'exécution; mais, comme elle refusait d'admettre la division des pouvoirs, elle se vit obligée de créer dans son sein un pouvoir dirigeant et coërcitif. Elle institua les comités de salut public et de sûreté générale. Elle ne craignit pas, en premier lieu, de leur conférer de très-grandes attributions, parce que les membres qui les composaient étaient amovibles, qu'ils devaient se renouveler à des intervalles très-rapprochés, et qu'ils se trouvaient en nombre assez considérable pour se surveiller et prévenir ou détruire l'ascendant de l'un de leurs collègues. Cette combinaison, dictée par un esprit de démocratie rasante, avait pourtant si mal répondu à l'attente de ses auteurs, qu'elle fût remplacée dans la constitution de l'an III. (V. 23 septembre 1795), par l'institution de

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