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blessé le 5. Le maréchal Ney y brille de tout l'éclat de sa valeur. Les généraux Oudinot, Marchand, Latour-Maubourg, Verdier, le colonel Curial, se font distinguer. Une batterie de 30 pièces commandée par le général Senarmont faisant, à 400 pas en avant des colonnes, un feu de mitraille, écrase les masses ennemies qui, forcées sur tous les points, précipitent leur retraite sur la rive droite de l'Alle. Elles sont poursuivies long-temps après le coucher du soleil, pendant que les corps des maréchaux Davoust et Soult, soutenus par une partie de la cavalerie du maréchal Murat, s'avancent sur la rive gauche pour déborder Koenigsberg. La perte des ennemis est très-considérable; et, d'après la relation prussienne assez conforme aux bulletins français, elle s'élève à 17,000 morts ou blessés, autant de prisonniers et 70 canons. La nôtre est grande aussi, même en généraux tués ou blessés. Mais les résultats sont éminemment décisifs, quoique les Russes aient montré en ce jour beaucoup plus de fermeté qu'ils n'en montrèrent à Austerlitz ( 2 décembre 1805), et qu'on ne puisse pas non plus assimiler leur marche rétrograde, après cette journée de Friedland, à la déroute des Prussiens du champ d'Iéna ( 14 octobre 1806), déroute chargée d'ignominie et à laquelle on ne trouve rien, dans les annales de la tactique moderne, qu'on puisse lui comparer. La savante bravoure des officiers français à Friedland excite l'admiration. Victor, général peu brillant, mais solide, qui a beaucoup contribué au succès de la journée, reçoit le bâton de maréchal, sur le champ de bataille; le colonel Curial y est nommé général de brigade.

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Juin 16. Prise de Koenigsberg. le maréchal Soult entre dans la seconde capitale de la Prusse, hors d'état d'être défendue depuis la défaite de l'avant-veille. Cette place servant d'entrepôt général aux armées ennemies, d'immenses approvisionnements y sont rassemblés, son port contient un grand nombre de bâtiments anglais et russes, chargés de munitions, d'armes, de subsistances et de denrées coloniales.

16. Prise de Neisse. Cette importante forteresse de la haute Silésie est délivrée aux Français avec un matériel très - considérable d'artillerie et 6,000 prisonniers.

18. Capitulation conditionnelle de Glatz, forte place de Silésie, près de la Bohême.

18. Capitulation conditionnelle de Kosel, petite forteresse dans la haute Silésie.

19. Le quartier-général de la grande armée s'établit à Tilsitt place

ouverte et de moyenne importance, située près de la frontière orientale des états prussiens, sur la rive gauche du Niémen, qui prend le nom de Mémel avant de se jeter dans le Curisch-Haff à 15 1. N. de Tilsitt. Il ne reste au roi de Prusse que la petite ville et le petit territoire de Mémel, la position assez avantageusement défendue de Colberg dans la Poméranie ultérieure, la forteresse secondaire de Silberberg dans la haute Silésie, et la place importante de Graudenz. Sept mois ont suffi à la valeur de l'armée française et au génie de son chef, pour réduire à une existence nominale l'héritier de Frédéric II et pour atteindre la frontière du successeur de

Pierre Ier.

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Juin 21. Armistice conclu à Tilsitt, entre l'armée française et l'armée russe, afin de négocier la paix.

25. Première entrevue des empereurs Napoléon et Alexandre, dans un pavillon élevé sur un radeau au milieu du Niémen, à Tilsitt. 26, 27, 28. Seconde entrevue des deux empereurs, le roi de Prusse y est admis. La moitié de la ville de Tilsitt est neutralisée, les deux empereurs s'y établissent. Le roi de Prusse s'y rend aussi.

Juillet 7. TRAITÉ de paix conclU A TILSITT, entre la France et la Russie.

L'empereur Napoléon, par égard pour l'empereur Alexandre, restitue au roi de Prusse une moitié de sa monarchie; mais une trèsgrande partie des anciens territoires polonais passeront sous la souveraineté du roi de Saxe, nommé Grand-duc de Warsovie. - Dantzick avec un rayon de deux lieues, est rétabli dans son indépendance. Napoléon accepte la médiation de la Russie auprès de l'Angleterre. Alexandre reconnaît la confédération du Rhin et les trois frères de son vainqueur, Joseph, Louis, Jérôme, rois de Naples, de Hollande, de Westphalie. Les troupes russes évacueront la Moldavie et la Walachie.

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Si Napoléon avait une politique sincère et véritablement grande, qu'il songeât moins à la fortune de sa famille, à sa prépondérance personnelle et au viager de sa puissance, qu'au repos de la France, et à l'avenir de l'Europe, il profiterait de la conjoncture pour demander à la Russie et pour négocier avec l'Autriche, la restitution des territoires polonais, échus à ces deux puissances en 1795. Rétablissant le trône de Sobieski avec un meilleur systême de monarchie, il formerait une barrière plus forte contre l'ambition de la Russie; il préserverait plus efficacement l'Allemagne de l'influence de l'Autriche et de la Prusse, qu'en créant deux faibles états sous les noms

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de royaumes de Westphalie et de Saxe. La politique de Napoléon offre toujours quelque chose de gigantesque, de hasardeux, d'incohérent, d'inachevé, que n'eurent point les conceptions de Richelieu, de Mazarin. La nation polonaise est sacrifiée ici, de la manière la moins généreuse. Ce n'est pas ainsi qu'en agirent Henri IV envers les Hollandais, Richelieu envers la maison de Bragance.

Ce traité plonge en outre toutes les autres puissances de l'Europe dans un vasselage humiliant, comme dans l'incertitude sur leur sort. Il n'y existe plus que trois états indépendants : la France, la Russie, l'Angleterre.

Juillet 9.TRAITÉ DE PAIX CONCLU A TILSITT, entre la France et la Prusse. Frédéric Guillaume III renonce à toutes ses possessions entre le Rhin et l'Elbe. Il abandonne à la Saxe la presque totalité de la Pologne prussienne, ainsi que le cercle de Cotbus en Lusace. En outre, il sera ouvert plusieurs routes militaires à travers les états prussiens, pour faire communiquer le royaume de Saxe et le duché de Warsovie. Tous les pays restent à la Prusse seront fermés à la navigation et au commerce anglais. Art. 28. Toutes les provinces que le roi conserve doivent être évacuées avant le premier octobre 1807, pourvu que les contributions de guerre soient acquittées; et elles seront reconnues comme telles, lorsque l'intendant de l'armée française aura reconnu valables les sûretés offertes.

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Par ce traité, la Prusse perd au-delà de la moitié de son territoire et près de la moitié de sa population. Il ne lui reste pas six millions de sujets, de dix millions et demi qu'elle comptait avant la journée d'Iéna. Son territoire démantelé, ouvert sur toutes ses frontières, forme un long parallélogramme jeté sur les bords de la Baltique, s'étendant 180 lieues de l'O. à l'E., et réduit à une largeur de 40. Les prohibitions stipulées, relativement aux communications avec l'Angleterre, empêcheront que les landes et les sables de ces pays ne soient fertilisés par les produits du commerce maritime et les échanges de l'industrie.

L'histoire moderne n'offre point d'exemple d'une puissance descendue à ce degré d'abaissement et d'humiliation, par l'effet d'une conquête aussi rapidement exécutée. Les Prussiens conduits par des conseillers et des capitaines également inconsidérés ont mérité d'être atteints à-la-fois, par la honte et le malheur. Chassés en quelques semaines, comme un gibier timide, des défilés de la Thuringe audelà de la Vistule, ils ont perdu jusqu'à leur réputation de bravoure. Nul fait d'armes n'a justifié ce haut renom qui surprit l'Europe hi

zarrement engagée dans la guerre de 1744. Les annales de cette nation fortuitement agglomérée pendant la première moitié du 18° siècle, n'offre de remarquable que cinq ou six campagnes, avec deux capitaines Frédéric II et le prince Henri. Voilà tout ce qui fait l'illustration de cette monarchie, et cependant les Prussiens se donnent comme les Macédoniens de l'Allemagne. En ce cas, ils auront été à léna, ce que furent les compagnons de Persée à Pydne, après avoir faiblement ressemblé sous l'un de leurs cinq rois aux soldats d'Alexandre fils de Philippe.

Cependant, quoiqu'on ne puisse guères s'intéresser au sort d'une puissance élevée par de continuelles usurpations, quelque mérité que semble le châtiment infligé à ce cabinet, dont la politique fomenta les discordes en France comme en Pologne, et profita si peu honorablement des désastres dans lesquels la plus terrible des révolutions enveloppa l'Europe, on se sent indigné des procédés du vainqueur d'Iéna et de Friedland, choqué de son langage oriental. Outrageusement ignoble dans la manifestation de ses ressentiments, dont il s'étudia si bien à provoquer les occasions, Napoléon se complaît dans l'humiliation d'un monarque abattu. Ce n'est pas Alexandre devenant plus grand lorsqu'il relève Sapor; c'est Tamerlan prodiguant l'insulte à Bajazet. Le courage de la reine de Prusse ne devrait-il pas être admiré comme l'avait été le courage de Marie-Thérèse d'Autriche? Les généraux prussiens sont-ils donc moins généreux dans leur élan patriotique que ne le furent les palatins hongrois ? Le vainqueur d'léna doit-il donc, en s'adressant aux élèves de Frédéric, s'écrier dans le palais même de Frédéric : « Je rendrai cette noblesse de cour si petite, qu'elle sera réduite à mendier son pain. >> L'arrogance du triomphateur, plus cruelle que la blessure de ses armes, ulcère l'ame du vaincu et ne cessera de l'exciter aux extrêmes résolutions de la vengeance. Après de si grand succès, il serait beau de se reposer; de donner le bonheur à la France, la paix au monde. Mais Napoléon s'irrite encore d'apercevoir au loin des bornes à sa puissance. Périsse le monde, et que sur ses décombres s'élève le trône de Napoléon!

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En vain, des traités avantageux auront suivi ses victoires; il aimera, tel qu'un joueur insatiable, à livrer, sans relâche, sa puissance aux chances les plus hasardeuses. Il refusera de voir que la modération et la bonne foi peuvent seules consolider un trône nouvellement fondé. Il pense que son gouvernement et les anciens gouvernements ne sauraient co-exister. Il veut les détruire successivement; établir une

seule famille en Europe, sacrifiant toute la génération présente à ce dessein, et se justifiant par le tableau de l'ambition et de la cupidité anglaises. A peine aura-t-il terminé cette guerre dans le nord, qu'il dirigera sa politique destructive, et portera ses armes au-delà des Pyrénées.

Juillet 12. Convention de Koenigsberg, à l'effet de déterminer l'époque des différentes évacuations de territoire qu'opéreront les troupes françaises en Prusse, en Silésie et dans les provinces de l'Elbe, conformément à l'art. 28 du traité du 9.

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29. L'empereur victorieux, de retour à Paris, est l'objet des adulations les plus forcées. Le premier président de la cour d'appel ( Séguier) le harangue ainsi : « Mais, Sire, il est une chose plus extraordinaire que les prodiges de V. M.; c'est que vous résistiez à « la fortune qui affecte pour vous l'empire de la terre; que vous soyez « moins ambitieux de vaincre que de vous réconcilier; que vous ne « fassiez sentir, par vos armes, les dangers de votre inimitié, que « pour faire comprendre par la force de votre génie, les avantages << de votre alliance. Napoléon n'a jamais voulu que la paix du monde ; « il a toujours présenté la branche d'olivier à ses provocateurs, qui l'ont forcé d'accumuler les lauriers. NAPOLÉON EST AU - DELA DE « L'HISTOIRE HUMAINE; IL APPARTIENT AUX TEMPS HÉROÏQUES; IL EST « AU-DESSUS DE L'ADMIRATION; IL N'Y A QUE L'AMOUR QUI PUISSE S'É« LEVER JUSQU'A LUI........ (V. l'art. suiv.).

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Août 16. Corps législatif. Séance impériale.

Napoléon dit :

Je desire la paix maritime. Mon ressentiment n'in

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<< FLUERA JAMAIS SUR MES DÉTERMINATIONS; je n'en saurais avoir con« tre une nation, jouet et victime des partis qui la déchirent, et trompée sur la situation de ses affaires comme sur celle de ses « voisins. Mais, quelle que soit l'issue que les décrets de la provi«dence aient assignée à la guerre maritime, mes peuples me trouve«ront toujours le même, et je trouverai toujours mes peuples dignes « de moi..... -Quelques jours après, le président, ex-poëte Fontanes, répondra : « TOUS NOS COEURS SONT ÉMUS AUX TÉMOIGNAGES « DE VOTRE AFFEction pour les FRANÇAIS. Les paroles que vous avez « fait entendre du trône ont déja réjoui les hameaux. Un jour, on « dira, en parlant de vous (et ce sera le plus beau trait d'une his<< toire si merveilleuse), on dira que la destinée du pauvre occupait « celui qui fait la destinée de tant de rois, et qu'à la fin d'une lon« gue guerre vous avez diminué les charges publiques, tandis que « vos mains victorieuses distribuaient, avec tant de magnificence,

«

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