les restes de l'armée. Après avoir donné des secours aux soldats, et remonté les esprits, il fit circuler des proclamations bien plus modérées que celles répandues jusqu'alors. II promettait d'adoucir, autant qu'il dépendrait de lui, les horreurs de la guerre, et de bien traiter les prisonniers, s'il y avait réciprocité de la part des constitutionnels. Un nombre immense d'habitans des campagnés vint s'enrôler sous ses drapeaux : les bandes royalistes qui erraient dans la province de la Biscaye, Alava et de Guypuscoa, reconnurent son autorité. Bientôt il fut en mesure de tenir la campagne et d'effacer la honte de la défaite de los Arcos. Ce fut alors que Torrijos, qui servait en Catalogne sous Mina, fut nommé commandant-général de la Navarre, à la place d'Espinosa. Il débuta par des proclamations et des promesses d'amnistie dont l'effet në fut pas plus favorable en Navarre qu'il ne l'avait été en Catalogne. Bientôt il fut forcé de combattre dans la plaine d'Estella, où le général O'Donnell se présenta avec des forces considérables. On vit dans ce combat ce qu'on ne voit que dans les guerres civiles, la lutte entre deux frères suivant chacun un parti opposé. Un des frères du général O'Donnell, colonel du régiment impérial Alexandre, à la tête de son régiment, décida la bataille en faveur des constitutionnels; la perte des deux armées fut considérable. Les royalistes se replièrent sur Lombier, et ensuite sur Ochogavia, où il fallut suspendre les opérations militaires, à cause de la rigueur de l'hiver; la nature vint arrêter la fureur des hommes. Nous terminerons ici le récit des opérations militaires de la Catalogne et de la Navarre, pour jeter un coup-d'œil sur ce qui se passait à Madrid; nous nous occuperons ensuite des stipulations diplomatiques de Vérone. Si quelque chose pouvait encore ajouter à l'orgueil des constitutionnels, après l'affaire du 7 juillet, c'était le triomphe de Mina, et l'abattement dans lequel les royalistes étaient tombés sur tous les points de l'Espagne. Mais au milieu de leur allégresse, ils étaient troublés par la crainte de voir tôt ou tard intervenir les puissances de l'Europe dans la révolution espagnole. Dès l'année précédente, les souverains alliés, avant de se séparer à Laybach, étaient convenus de se réunir l'année suivante à Vérone, afin de prendre les mesures nécessaires pour l'affermissement de la tranquillité en Italie; et il était évident que l'état de l'Espagne serait aussi l'objet de leurs délibérations. L'Europe était dans l'attente: on avait annoncé l'ouverture du congrès pour le commencement de septembre 1822; mais la mort du marquis de Londonderry, plus connu sous le nom de lord Castlereagh, la retarda de quelque temps. Ce diplomate avait eu une grande influence dans les délibérations précédentes. Aussi, son suicide fut une affaire de grande importance, d'autant plus que le successeur de ce ministre pouvait ne pas avoir les mêmes idées politiques. Ce qui différa aussi de quelques jours l'ouverture du congrès, fut l'inspection annuelle des forteresses des Pays-Bas, que lord Wellington était chargé de faire, et la maladie de ce général, qui l'empêcha d'arriver à Vienne à l'époque convenue; l'empereur Alexandre et le plénipotentiaire français s'y trouvaient déjà depuis plusieurs jours, quand lord Wellington arriva. Un des premiers documens présentés au Parlement britannique, fut la note confidentielle communiquée dans le mois de mai 1820, par lord Castlereagh, aux ministres d'Autriche, de France, de Russie et de Prusse. On y déclarait l'intention du cabinet britannique de n'émettre aucune opinion sur les innovations qui venaient d'avoir lieu en Espagne, et l'on y démontrait les dangers qui devaient résulter d'une intervention étrangère dans les affaires de ce pays, surtout si elles avaient lieu de la part de la France. Lord Wellington, en soutenant ces mêmes idées, s'appuyait sur la connaissance qu'il avait du caractère et des opinions des Espagnols. L'évènement n'a pas justifié ces prédictions: néanmoins, ni lord Castlereagh ni lord Wellington ne voulaient pas qu'on regardât avec une indifférence absolue les altérations essentielles que le gouvernement espagnol avait subies. La manière surtout dont ces altérations avaient été exécutées leur paraissait digne de fixer l'attention. Ils étaient d'avis tous deux que des révolutions de cette nature ne pouvaient avoir lieu chez une nation d'une importance politique telle que l'Espagne, sans compromettre la tranquillité des autres peuples; les puissances alliées devaient se borner à demander, par l'intermédiaire de leurs agens diplomatiques à Madrid, quelques modifications salutaires à la Constitution. Les seuls cas d'intervention', selon les ministres anglais, devaient être ou des violences exercées contre la personne du roi ou de sa famille, ou des hostilités de la part de l'Espagne contre le Portugal, que l'Angleterre, en vertu des traités, s'était obligée à défendre. Dans ces séuls cas, disaient les deux lords, le Parlement britannique pourrait sanctionner les principes de la Sainte-Alliance, qui s'était formée pour s'opposer à l'esprit d'oppression de la France, et non pour s'arroger le droit de gouverner. Quoi qu'il en soit de la force et de la vérité de ce raisonnement, les souve rains alliés différèrent de s'occuper à Laybach des affaires de l'Espagne, quoiqu'ils fussent convaincus des suites, fâcheuses qu'elles devaient entraîner, ainsi que de la |