En 1713, le jeune Wesley fut mis en pension à Londres, où il resta quelque temps. On remarqua, dès son Histoire de Jean Wesley et des progrès du Méthodisme, remarque à l'occasion de ce fait « que les témoins qui l'attestent paraissent entièrement à l'abri d'un reproche de vaines terreurs et même de superstition et de crédulité, excepté cependant en ce qui regarde, la simple possibilité d'une apparition,» mais il observe de plus que lorqu'il est clair qu'il ne devra pas en résulter un bien évident, on peut hardiment assurer qu'il n'y a pas de miracle, et il admet, comme l'explication la plus naturelle, que c'était simplement une plaisanterie de quelques personnes de la maison pour effrayer la famille. En réponse à cette manière d'envisager la chose, il suffira de dire qu'un grand nombre de circonstances ne peuvent être ramenées aux explications ordinaires, et qu'au contraire elles s'y dérobent entièrement. L'opinion qu'il cite pourrait être soutenue si le terme miracle était applicable aux bruits en question; mais par le mot miracle le docteur Priestley entend une manifestation immédiate de la puissance divine, et il ne paraît pas qu'il y ait eu ici cette intention, ou que la simple apparition d'un esprit doive faire admettre ce dessein. De tels événemens peuvent être au dessus de la nature et non miraculeux; ils peuvent ne pas être dans son cours ordinaire et en même temps ne pas nous montrer une altération de ses lois (!!). et, quant à ce qui se rapporte au bien qui pourrait peutêtre en résulter, ce serait une fin suffisante de pareils événemens, si, par leur influence, une seule de ces malheureuses personnes, dont la vue, couverte des nuages de l'infidélité, ne peut rien découvrir au-delà des bornes de cette vie et des intérêts du monde, se retirait persuadée (après la vue d'un de ces faits, insignifians et futiles au premier abord) qu'il existe, dans le ciel et sur la terre, bien plus de choses qu'elles ne croyent en apperçevoir dans leur triste philosophie. » Tom. I, p. 26, 27. sa premiêre jeunesse, qu'il se croyait destiné à accom plir de grandes choses. Ce fut un trait de ressemblance qu'il eut avec le comte Ziuzendorf, qui contribua si puissamment à fonder l'établissement morave de Hennhut. Il se distingua d'abord par son goût pour la poésie, et on a conservé parmi ses œuvres des vers anglais et quelques traductions des classiques latins, qui ne sont pas sans mérite. Il abandonna bientôt ces délassemens littéraires, pour se livrer tout entier à des occupations plus sérieuses. En 1725, il entra à l'univer sité d'Oxford. Sou caractère grave et porté à la méditation, se développa bientôt, et lui fit prendre la résolution de se consacrer au ministère. Son père lui conseillait d'attendre encore quelques années, de bien réfléchir avant de prendre la plus redoutable des charges, et de se sonder lui-même, afin de bien s'assurer qu'il était digne d'entrer dans cette importante carrière. Sa mère, au contraire, ne cessait de lui recommander cet état. On dirait qu'elle eût voulu voir renaître dans son fils la profonde piété qui avait toujours distinguề sa famille, et ce fils ne démentit point ses espérances. « Prends la résolution, lui écrivait-elle, de faire de la religion l'occupation principale de ta vie; c'est la seule chose nécessaire, tout le reste n'est qu'une chose accessoire pour le bonheur de ce monde et pour la gloire de l'autre. Ce que je te recommande avant tout, c'est de bien rentrer en toi-niême, et de te consulter, au que tu sois persuadé des mérites de la mort de JésusChrist. Si tu trouves en loi cette conviction, tu seras assez récompensé de tes peines; si au contraire tu n'as pas cette conviction, ne cherche pas à te consoler, car tu ne le seras jamais. » Ces énergiques conseils ne pouvaient manquer de produire le plus grand effet sur l'âme de Wesley, et il nous apprend lui-même l'état de ses opinions à cette époque, lorsque, dans un des ouvrages de sa vieillesse, il point quelles furent ses impressions au commencement de ses travaux. «Lorsqu'il plût à Dieu, dit Wesley, de m'inspirer la résolution d'être chrétien, non pas seulement de nom, mais de sentiment et de fait, et je n'avais alors que vingt-deux ans, j'étais ignorant des plus simples vérités de la religion. Entouré de mes condisciples, je m'aperçus bientôt qu'il y avait entre eux et moi une grande différence. J'étais convaincu de mon ignorance, mais ils ne s'étaient pas encore avoués à eux-mêmes que de semblables ténèbres les entouraient. Je fis bien quelques efforts pour les en convaincre, mais ce fut en vain, et ne tardai pas à m'apercevoir que leur commerce et leur conversation, bien qu'elle fût innocente en elle-même, menaçait d'ébranler mes résolutions; je ne voyais aucun moyen de me soustraire à cette influence, lorsque, par bonheur, j'entrai dans un autre college. Je prévis alors qu'une foule d'amis nouveaux allaient m'obséder, mais je résolus de choisir moimême mes amitiés. J'entrais, pour ainsi dire, dans un monde inconnu, et je ne voulus me lier qu'avec des amis qui pourraient m'aider à m'élever vers le ciel. En conséquence, j'examinai prudemment les personnes auxquelles je pouvais me fier et je n'eus aucune raison de croire que les hommes dont j'étais entouré aimassent Dieu; je vis que je n'en pouvais attendre aucun bien; dès lors, à cette question, quand viendrez-vous me voir? je ne faisais aucune réponse, et je me dispensais 'd'aller voir ceux avec lesquels je n'aurais pû me lier sans danger. C'est ainsi que je me conduis depuis 60 ans, et, quoique je susse alors fort bien que cette apparente négligence des devoirs du monde, m'attirerait peutêtre des sarcasmes assez amers, je n'en tins aucun compte, prévoyant même au commencement de mon ninistère que je le parcourerais quelquefois au milieu des bénédictions des hommes, plus souvent au milieu de leurs reproches. Pendant le séjour que fit Jean Wesley au college de Lincoln, ressortant de l'université d'Ox ford, on le nomma examinateur public et il est probable que ce fut dans l'exercice de cette fonction qu'il contracta cette habitude de raisonner avec clarié et logique, qu'on retrouve dans la plupart de ses -no vrages. On remarque dans ses nombreux écrits une clarté qui ne manque que trop souvent aux discussions théologiques. La méditation des traités de Willam Law, célèbre auteur d'un livre, appelé Le Parfait Chrétien, contribua à donner, à Wesley et à son frère, un goût bien décidé pour les études religieuses. Ils ne tardèrent pas à organiser ensemble dans l'université, une association de piété dans le but spécial de porter les étudians à réfléchir sur les vérités de l'évangile. Ils se faisaient remarquer par un rigorisme absolu; ils s'interdisaient tout amusement, se levaient dès la pointe du jour, communiaient toutes les semaines et passaient presque toute la journée, soit à méditer sur les enseignemens des écritures, soit à secourir les prisonniers détenus dans les prisons de la ville. Un strict emploi du temps formait le caractère principal de leur manière de vivre, et une division méthodique du jour, en diverses parties consacrées chacune à une occupation fixe, leur valut le nom de méthodiste : du moins c'est ainsi qu'on l'explique généralement. Ils disaient eux-mêmes que leur résolution était de « vivre méthodiquement et de ramasser même les fragmens du temps, afin qu'il ne s'en perde pas la moindre portion. Dès ce moment, Jean Wesley résolut de consacrer tous ses instans à la prédication de la Parole. La lecturę de l'Imitation de Jésus-Christ, par le moine Thomas à Kempis, acheva de lui inspirer ce zèle pour l'avancement du règne de Dieu sur la terre. Peu de temps après, Samuel Wesley mourut, et les deux Frères recurent les derniers conseils de leur ministre et de leur père. Ils jurèrent d'honorer sa mémoire en continuant ses travaux. Jean Wesley se rendit à Londres après la mort de son père, pour présenter à la reine Caroline, épouse de George Ier., un traité de Samuel Wesley, des racines profondes et à remplir les âmes de conviction. De plus, l'Eglise anglicane s'était séparée d'avec les méthodistes; et, par cette scission, ils se trouvaient en état d'hostilité avec les personnes qui pensent que le salut de l'Eglise dépend de sa relation étroite avec le gouvernement. Malgré des obstacles d'une nature si diverse, le méthodisme compte un très-grand nombre de disciples, et non pas seulement, comme on le pense assez généralement, parmi les personnes inférieures quant aux lumières et à la position sociale, mais aussi au sein des classes élevées et parmi les hommes distingués par leur influence et leur savoir. Il nous a seinblé que quelques détails sur la vie du fondateur de cette nouvelle division de la grande famille chrétienne, ne paraitraient pas dénués d'intérêt, aujourd'hui qu'une ferveur religieuse se manifeste de toutes parts, et dans un temps où on se plaît à relire l'histoire de ces hommes pleins d'ardeur et de sincérité, qui vouèrent toute leur existence à répandre des idées religieuses uniquement fondées sur l'Evangile. Avant de commencer cette esquisse biographique de la vie et de la conduite de Jean Wesley, jetons un coup-d'oeil sur l'état de sa patrie, au moment où il commença ses travaux. Il paraît que l'Angleterre se trouvait alors dans un état de langueur religieuse qui demandait un prompt remède. Les historiens et les mémoires du temps s'accordent à nous donner un assez triste tableau de la situation de la nation, vers le temps où Georges Ier, commença son règne. Le système financier de l'Ecossais Law, et ses absurdes spéculations sur le commerce des Indes, avaient introduit, daus toutes les classes de la société, cette ardeur pour le gain, ces goûts sordides, qui exclnent tout sentiment de piété, quand une fois ils se sont introduits dans les occupations du jour. Cette soif de richesses exerça l'influence la plus désastreuse, chez les classes les plus pauvres, |